Dons d’organes, PMA : l’ABM mise sur les territoires

Publié le 6 Juil, 2023

L’Agence de la biomédecine (ABM) vient de publier son rapport annuel. Un document qui met en avant démocratie sanitaire et territorialisation. Un référent a ainsi été identifié dans chacune des Agences régionales de santé (ARS), pour chacune des activités de l’Agence.

Le protocole Maastricht III toujours vedette

En matière de dons d’organe, « les objectifs du plan ministériel sont extrêmement ambitieux » pointe Marine Jeantet, directrice de l’ABM. Le plan lancé en 2022 fixe en effet des « objectifs chiffrés » et « propose des indicateurs région par région pour augmenter le nombre de prélèvements sur donneurs décédés en état de mort encéphalique ou d’arrêt cardio-respiratoire (Maastricht III) » (cf. Greffes d’organes : un niveau insuffisant selon l’ABM). Il entend aussi promouvoir la greffe issue de donneur vivant, avec un objectif de 20% à la fin du plan, précise Michel Tsimaratos, directeur général adjoint chargé de la politique médicale et scientifique à l’Agence de la biomédecine.

Actuellement 20 000 personnes sont en attente d’une greffe en France. 5495 transplantations ont été pratiquées avec des organes issus de 1694 donneurs décédés, dont 235 prélevés selon le protocole Maastricht III, et 535 donneurs vivants. Désormais, ce sont 52 centres Maastricht III qui sont ouverts. Le protocole a aussi fait l’objet de l’un des deux avis « majeurs rendus » par le Conseil d’orientation de l’ABM en 2022 [1].

Pour atteindre ses objectifs, le plan organes-tissus a été doté d’un « financement complémentaire » de 210 millions d’euros, ce qui porte à 2 milliards d’euros le budget de cette « activité » pour la période 2022-2026.

AMP : « vers une équité des chances de procréer sur le territoire »

En matière d’assistance médicale à la procréation, l’ABM compte aussi sur les territoires. 18 référents, un par ARS, ont été nommés. « Nous allons nous appuyer sur ce réseau pour réaliser un état des lieux et une approche cartographique des besoins de chaque région, tant dans les établissements publics que privés, puisque dans le domaine de l’aide médicale à la procréation, la moitié des centres sont privés » précise le Pr Philippe Jonveaux, directeur de la procréation, de l’embryologie et de la génétique humaines à l’Agence de la biomédecine.

En outre, dans le cadre de sa mission d’appui et de conseil aux centres d’AMP [2], l’Agence « vient de mettre en place une méthodologie pour tendre vers une équité des chances de procréer sur le territoire ». 28 020 enfants sont nés après une PMA en 2021. L’objectif est de répondre aux « nouveaux enjeux, de ressources humaines, de nouvelles technologies, mais aussi à des enjeux plus concrets sur les délais ».

Par ailleurs, le registre des donneurs est en place se félicite l’ABM. 399 nouveaux donneurs de spermatozoïdes ont été recensés en 2021, et, actuellement, 607 donneurs sont renseignés au sein du registre sans délivrance (pas encore d’enfant). 95 délivrances ont été enregistrées, avec les informations sur les donneurs et les enfants issus du don, indique le rapport.

Vers une « mini-révolution » réglementaire ?

« Les activités liées aux tissus, aux cellules et aux gamètes vont connaître une mini-révolution à l’échelle européenne » souligne l’ABM. « En effet, alors qu’elles étaient jusqu’à présent régies par des directives, elles vont bientôt faire l’objet d’un règlement européen commun avec le sang. » Une disposition directement applicable dès son entrée en vigueur, contrairement aux directives qui doivent être transposées en droit national.

« L’objectif de cette révision est de garantir un niveau de protection élevé et égal à tous les donneurs européens de tissus, de cellules et de sang, explique Emilie Besegai, juriste de l’ABM. Il s’agit aussi de favoriser les échanges entre Etats membres pour répondre à des situations de crise comme celle que nous avons connue avec la Covid-19. »

Un dépistage anténatal dans quel but ?

« Les techniques de dépistage, de diagnostic et de prise en charge du fœtus ont énormément évolué ces dernières années, explique Olivier Picone, gynécologue-obstétricien, président de la Fédération nationale des centres pluridisciplinaires de diagnostic prénatal (CPDPN). Les potentiels thérapeutiques sont bien plus importants, on parle désormais de médecine fœtale. » (cf. Opération du cerveau in utero : une première mondiale) Dépisterait-on pour pouvoir soigner ?

En France, il existe 5 centres de diagnostic préimplantatoire (DPI). Ils « analysent les embryons obtenus par fécondation in vitro en cas de risque avéré de développer des pathologies d’origine génétique ou chromosomique transmissibles par l’un des parents ou les deux » pour ne faire naître que ceux dépourvus de la pathologie. En 2021, 309 enfants sont nés après un DPI, et « le nombre de diagnostics préimplantatoires augmente régulièrement » indique le Pr Jonveaux.

Or les « bonnes pratiques » n’étaient pas encore formalisées en la matière, contrairement au dépistage prénatal (cf. Dépistage prénatal : la trisomie 21 au cœur de la cible). L’ABM a ainsi initié la rédaction de recommandations qui ont été soumises à la Direction générale de la Santé. Un arrêté du ministère devrait « bientôt » les officialiser.

L’ABM se penche sur les « embryons de synthèse »

L’Agence de la biomédecine est également chargée d’approuver les recherches qui utilisent des embryons humains. Les cellules souches (CSEh) sont en effet désormais soumises à un simple régime déclaratif depuis la dernière loi de bioéthique (cf. Loi de bioéthique : un décret d’application précise les conditions de la recherche sur l’embryon et les cellules souches).

C’est dans ce contexte que l’ABM indique avoir lancé « une réflexion » sur les « embryons de synthèse » au début de l’année. Un domaine qui n’est pas réglementé en dépit des « avancées » très rapides des chercheurs (cf. « Embryons de synthèse » humains : les annonces se multiplient). « Le Conseil d’orientation a donc estimé important de rendre un avis sur le statut de ces organismes susceptibles de bénéficier de progrès technologiques rapides au cours des prochaines années, et se prononcer en particulier sur les limites à fixer à leur développement in vitro » indique le rapport. En visant, comme pour les CSEh, « une plus grande souplesse pour les chercheurs » ? (cf. Embryoïdes, blastoïdes, MEUS : des embryons créés pour la recherche ; Recherche sur l’embryon : l’ISSCR joue sur les mots)

 

[1] Le premier portait sur les examens génétiques demandés aux donneurs de gamètes. Le second, sur le transfert de personnes décédées après arrêt circulatoire dans le cadre du protocole Maastricht III, après une saisine du CCNE. Le Conseil d’orientation y estime que « l’opération doit se faire impérativement avec l’accord de la famille attestant que son proche n’était pas opposé au don de ses organes ou tissus, mais aussi et surtout acceptant le transfert lui-même ».

[2] Assistance médicale à la procréation, synonyme de PMA, procréation médicalement assistée

Photo : iStock

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