Le rapport annuel de l’Agence de la biomédecine (ABM) fait le bilan de l’« activité » de dépistage et de diagnostic prénatal [1]. Sans surprise, la trisomie 21 est toujours au cœur des préoccupations de l’agence.
En France, 738 000 « naissances vivantes » ont été recensées en 2021. Mais avant de naître, ces bébés ont été passés au crible du dépistage, en particulier de celui de la trisomie 21.
« L’examen concernant le plus grand nombre de femmes enceintes est le dépistage de la trisomie 21 par les marqueurs sériques maternels avec 629 688 femmes[2] testées en 2021 », précise l’ABM. Une première étape suivie d’un deuxième crible : celui du DPNI. « L’activité d’examen prénatal évolue progressivement avec une augmentation du nombre des examens non invasifs (à partir de prélèvements sur sang maternel) et l’utilisation plus importante de technologies ayant une résolution diagnostique plus précise comme l’ACPA ou les techniques de séquençage à haut débit », pointe l’agence. Un examen « indolore ». Pour la femme tout du moins.
En 2021, 128 958 examens ont été pratiqués par les 28 centres autorisés. Mais sur ces 28 laboratoires, « 2 laboratoires privés réalisent environ 2/3 des examens ». L’activité serait-elle lucrative ?
La fiabilité du dépistage en question
Le nombre de fœtus porteurs de trisomie 21 diagnostiqués a augmenté de 7,5% en 2021, passant de 2 045 en 2020 à 2 199 en 2021. Le « tri » se veut fiable.
807 DPNI sont revenus positifs l’année dernière. Sur ces 807 fœtus, l’examen du caryotype a posé un diagnostic de trisomie pour seulement 666 d’entre eux. Dans 17,4% des cas, le DPNI s’est donc révélé un « faux positif ». Combien de femmes auront avorté suite à un dépistage défavorable, sans attendre une confirmation diagnostique ?
A l’inverse, l’analyse des données identifie 5 « faux négatifs ». Des fœtus porteurs de trisomie 21, non dépistée par l’analyse de leur ADN circulant dans le sang maternel. Dans trois cas, le DPNI indiquait une trisomie 13 qui s’est avérée être une trisomie 21. « Ces données feront l’objet d’un suivi », assure l’ABM. Les « faux négatifs » inquiètent-ils plus que les « faux positifs » ?
Une baisse du recours à l’IMG
Les diagnostics de trisomie 21 « découverts » à la naissance de l’enfant se font toutefois plus rares. De 500 en 2017, ils étaient seulement 390 en 2021. Des enfants pour lesquels la mère a refusé le dépistage ou les examens de diagnostic, ou encore les « faux négatifs », passés à travers les mailles du filet.
Une « attestation de particulière gravité pour motif fœtal » peut être délivrée en vue d’une interruption médicale de grossesse. La trisomie 21 représente plus du quart des attestations de l’année dernière[3]. Mais dans 2,1% des cas[4], bien qu’une attestation ait été délivrée, la femme n’a pas souhaité avorter. Un chiffre en augmentation[5]. Là encore, l’ABM promet « un suivi » (cf. Augmentation de la mortalité infantile en France : des causes diverses). La femme n’est-elle pas libre de ses choix ?
[1] « D’un point de vue juridique comme d’un point de vue médical, l’activité de diagnostic prénatal se différencie de l’activité de dépistage prénatal », explique l’ABM. Le dépistage fait état des « examens de biologie médicale ou d’imagerie permettant d’évaluer le risque que l’embryon ou le fœtus présente une affection susceptible de modifier le déroulement ou le suivi de la grossesse, mentionnés au II de l’article L. 2131-1 ». Ils comprennent :
- Les examens de biochimie portant sur les marqueurs sériques maternels ;
- L’échographie obstétricale et fœtale au sens du 1° du III du présent article ;
- Les examens de génétique portant sur l’ADN fœtal libre circulant dans le sang maternel (aussi appelé dépistage prénatal non invasif, DPNI)
Le diagnostic concerne lui « les examens de biologie médicale et d’imagerie à visée diagnostique mentionnés au IV de l’article L. 2131-1 ». Ils comprennent :
- Les examens de cytogénétique, y compris les examens moléculaires appliqués à la cytogénétique ;
- Les examens de génétique moléculaire ;
- Les examens de biochimie fœtale à visée diagnostique ;
- Les examens en vue du diagnostic de maladies infectieuses ;
- L’échographie obstétricale et fœtale au sens du 2° du III du présent article ;
- Les autres techniques d’imagerie fœtale à visée diagnostique.
Pour la trisomie 21, on entend par dépistage « un ensemble de procédures spécifiques clinique, échographique et biologique visant à évaluer le risque de trisomie 21 fœtale au cours de la grossesse et comprenant selon la situation :
- l’échographie de dépistage du premier trimestre de la grossesse ;
- un dépistage combiné du premier trimestre prenant en compte les mesures de la clarté nucale et de la longueur cranio-caudale ainsi que le dosage des marqueurs sériques maternels (MSM) du 1er trimestre de la grossesse (procédure préconisée) ou à défaut un dépistage MSM du deuxième trimestre prenant en compte le dosage des marqueurs sériques du 2ème trimestre de la grossesse, réalisés de préférence à partir de 15,0 SA ;
- un dépistage portant sur l’ADN fœtal libre circulant dans le sang maternel (ADNlcT21) réalisé en 2nde intention proposé en fonction du niveau de risque évalué par le dépistage utilisant les MSM.
Seul un prélèvement invasif permet de poser le diagnostic. »
[2] Soit 85,3%, en rapportant ce chiffre au nombre de naissances. Un taux qui a augmenté « rapidement » depuis 2010.
[3] 1804 des 7166 attestations délivrées en 2021
[4] 153 sur 7166
[5] Il était de 1,5% en 2019, avec 106 « IMG non réalisées »