« Contraception d’urgence » : quelle information des femmes ?

Publié le 5 Jan, 2023

Fin décembre, la Food and Drug Administration (FDA) a annoncé qu’elle allait revoir les emballages de la « pilule contraceptive d’urgence », Plan B. L’objectif de l’agence est de « mieux distinguer » entre « pilule du lendemain » et pilules abortives, en supprimant des emballages de Plan B la mention que le produit empêche l’implantation de l’embryon [1].

Un mode d’action opaque

Plan B est l’équivalent du Norvelo, commercialisé en France. Il contient 1,5 mg de lévonorgestrel (LNG), un progestatif de synthèse [2] dont la structure est proche de celle de la progestérone [3].

Son « mode d’action principal » est de bloquer et/ou de retarder l’ovulation par la suppression du pic de l’hormone lutéinisante (LH). Le LNG interfère avec le processus d’ovulation uniquement s’il a été administré avant l’augmentation initiale du taux de LH. Les études cliniques indiquent une proportion des grossesses évitées allant de 52 à 85%. Des études récentes sont également « unanimes sur le non effet du LNG sur l’implantation »[4].

Pourtant, la prise du LNG est « recommandée » quelle que soit la période du cycle pendant laquelle le rapport sexuel a eu lieu.

« En pratique, on ne peut pas vérifier directement si le LNG diminue le nombre d’embryons implantés parce qu’aucun test n’existe permettant de déterminer la présence dans le tractus génital féminin [5] d’un nouvel être vivant en gestation avant qu’il ne se soit implanté dans l’utérus maternel », souligne Jacques Suaudeau, docteur en médecine et ancien directeur scientifique de l’Académie Pontificale pour la vie [6]. En outre, « de tous les processus successifs à l’ovulation et qui pourraient être altérés par la contraception d’urgence [7], le seul mécanisme post-fécondation qui a été étudié chez la femme est l’altération de la réceptivité de l’endomètre, un mécanisme indirect », pointe-t-il.

Les altérations de l’endomètre sous LNG demandent du temps pour apparaître, ce qui explique les résultats des études sur le sujet, estime-t-il. Par conséquent, « c’est aux preuves épidémiologiques et à elles seules qu’il faut s’adresser pour préciser s’il y a ou non une activité anti-implantatoire du lévonorgestrel post-coïtal ». Et lorsque le LNG est pris dans un jour du cycle ovarien dans lequel l’ovulation ne peut être inhibée, on constate que son efficacité à empêcher une grossesse est de 88%. Dès lors, « l’unique explication possible d’une telle efficacité chez ces femmes, dans ces périodes où le lévonorgestrel ne peut exercer un effet contraceptif, est l’inhibition de la nidation de l’embryon », conclut Jacques Suaudeau.

Quelle information des femmes ?

En fonction du moment du cycle où elle intervient, la pilule du lendemain peut avoir un effet contraceptif ou « interceptif », donc abortif. Des mécanismes différents, tous recouverts par le terme de « contraception d’urgence ».

L’intervention de la FDA fait suite à la décision de la Cour suprême d’annuler l’arrêt Roe vs. Wade (cf. Etats-Unis : la Cour suprême met fin au “droit à l’avortement”). En effet, le gouverneur du Nevada a envisagé l’interdiction de la pilule Plan B. Dans l’Idaho, les cliniques scolaires en ont interdit la vente, « en vertu d’une loi interdisant le financement public des “services liés à l’avortement” l’année dernière » (cf. Avortement : l’Idaho dans les pas du Texas).

En vente libre aux Etats-Unis, la pilule du lendemain est désormais délivrée gratuitement en France à toutes les femmes, sans ordonnance (cf. La pilule du lendemain : « cavalier budgétaire » du PLFSS 2023). Pourtant, d’après les posologies usuelles recommandées, la quantité de LNG administrée en un jour à une patiente avec le Norlevo est 50 fois plus élevée qu’avec un contraceptif classique (cf. Gratuité de la pilule du lendemain : les paradoxes).

Aux Etats-Unis, environ un quart des femmes disent avoir déjà eu recours à la contraception d’urgence à un moment donné, selon une enquête des Centers for Disease Control publiée l’année dernière. Combien ont reçu une information claire ?

 

[1] Associated Press, Fda Changes Plan B Label, Clarifies It Won’t Cause Abortion, Amanda Seitz (23/12/2022)

[2] Norstéroïde

[3] Magali Duquesnes Berthouze, La contraception d’urgence chez les mineures : Etat des lieux de ce dispositif dérogatoire et enquête auprès des pharmaciens de Midi-Pyrénées, Thèse pour le diplôme d’Etat de Docteur en pharmacie, soutenue le 10 juillet 2017

[4] Ibid

[5] partie de l’appareil reproducteur située à l’intérieur du corps

[6] Jacques Suaudeau, Contraception, “interception” : les nouvelles techniques abortives (07/05/2010)

[7] transport du zygote dans la trompe de Fallope, développement préimplantatoire, réceptivité de l’endomètre utérin, caractère adéquat de la fonction du corps jaune, capacité de l’utérus à permettre le développement embryonnaire

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