Le 8 juillet, le Conseil constitutionnel a déclaré que l’article L2141-2 du code de la santé publique qui exclut l’ouverture de la PMA aux hommes transgenres, n’était pas contraire à la Constitution [1].
A la demande du groupe d’information et d’action sur les questions procréatives et sexuelles (GIAPS), le Conseil d’Etat avait transmis, dans une décision du 12 mai 2022, une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) au Conseil constitutionnel, saisi le 16 mai (cf. PMA pour les transgenres : le Conseil constitutionnel saisi ; La PMA pour les hommes transgenres devant le Conseil constitutionnel).
En effet, en vertu de l’article 61-1 de la Constitution « lorsque, à l’occasion d’une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question (…) ». Or, suite à la loi dite de « bioéthique » du 2 août 2021 autorisant la PMA pour « tout couple formé d’un homme et d’une femme ou de deux femmes ou toute femme non mariée », le GIAPS s’est interrogé sur la constitutionnalité de cet article qui semble exclure les hommes transgenres en se fondant sur le sexe à l’état civil.
Une atteinte au principe d’égalité entre les hommes et les femmes ?
En effet, l’article L2141-2 du code de la santé publique exclut les couples d’hommes, les hommes seuls et « ceux d’entre eux qui, nés femmes à l’état civil, ont changé la mention de leur sexe ». L’association reproche « une différence de traitements injustifiée entre les personnes disposant de capacités gestationnelles selon la mention de leur sexe à l’état civil ». Elle soulève une atteinte aux principes d’égalité devant la loi et d’égalité entre les hommes et les femmes. Selon le groupe, cet article porterait atteinte à la liberté personnelle et au droit de mener une vie familiale normale en contraignant « les hommes transgenres à renoncer à modifier la mention de leur sexe à l’état civil pour conserver la possibilité d’accéder à l’assistance médicale à la procréation ».
Des solutions divergentes pour des situations différentes
Dans sa réponse le Conseil constitutionnel se fonde sur l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 qui dispose que la loi « doit être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse ». Mais, le législateur peut régler de façon différente des situations différentes. C’est ce qui s’est passé dans le cadre de la PMA. Les femmes inscrites comme telles à l’état civil ne sont pas dans la même situation que les hommes transgenres bien qu’ils puissent, dans les deux cas, mener une grossesse [2]. La différence des situations peut justifier une différence de traitement. De plus, selon les juges constitutionnels, « le principe d’égalité ne s’oppose (…) à ce que le législateur (…) déroge à l’égalité pour des raisons d’intérêt général » si la différence de traitement est en « rapport direct avec l’objet de la loi qui l’établit ».
Une décision entre les mains du législateur
Malgré cette décision, le Conseil constitutionnel refuse de « substituer son appréciation à celle du législateur sur la prise en compte, en cette matière, d’une telle différence de situation ». Ce qui laisse les mains libres à ce dernier.
Enfin, suite au refus du Conseil constitutionnel, la Cour européenne des droits de l’Homme pourrait être saisie. Or, une vingtaine d’Etats membres a autorisé l’accès à la PMA pour les hommes transgenres comme l’Espagne, la Belgique ou les Pays-Bas [3]. La décision pourrait donc être rendue en leur faveur.
[1] Conseil Constitutionnel Décision n° 2022-1003 QPC du 8 juillet 2022
[2] AFP (08/07/2022)
[3] Marianne, « Le Conseil constitutionnel confirme que les hommes transgenres sont exclus de la PMA », Lucas Planavergne (08/07/2022)