Irlande : les médecins opposés à une loi sur le suicide assisté

21 Nov, 2023

Dans une présentation à la commission de l’Oireachtas, le Parlement irlandais, le représentant du Royal College of Physicians of Ireland (RCPI) a rappelé leur opposition à l’introduction d’une loi sur le suicide assisté. Le RCPI est le plus grand organisme de formation médicale postuniversitaire d’Irlande. Cet organisme professionnel regroupe plus de 11.000 membres de 29 spécialités médicales différentes (Cf. Irlande : des médecins s’opposent au projet de loi euthanasie ; Irlande : les psychiatres contre le projet de loi « mourir dans la dignité »).

Favoriser le développement des soins palliatifs

Estimant que le suicide assisté est « contraire aux meilleurs pratiques médicales », le RCPI encourage « une approche réfléchie et compatissante des soins, et une réponse proactive aux besoins et aux préoccupations des patients atteints d’une maladie évolutive ou incurable qui approchent de la fin de leur vie ». Cette position a été adoptée par le Conseil d’administration du RCPI en 2017 puis maintenue en 2020.

Alors que de nouveaux services de soins palliatifs ont été créés et que les formations dans ce domaine ont été développées, « la législation sur le suicide assisté menace de saper ces efforts » craint le RCPI. La loi risquerait de « détourner le financement, le développement et la fourniture de services de soins palliatifs, nouveaux et existants » explique l’organisme (cf. L’Association médicale américaine encore et toujours opposée au suicide assisté). Elle pourrait également réduire la recherche dans ce domaine. Or, « l’accent doit être mis sur la satisfaction » des besoins de ressources plus nombreuses et de meilleure qualité en matière de soins palliatifs, insiste le Royal College of Physicians of Ireland. Il faudrait, par exemple, une plus grande disponibilité des services et des traitements psychiatriques.

L’élargissement des lois sur le suicide assisté

Le représentant du RCPI alerte également sur les dérives constatées dans plusieurs pays qui ont légalisé le suicide assisté. Aux Pays-Bas, le recours au suicide assisté a été élargi aux nouveau-nés et aux enfants de plus de 12 ans (cf. Pays-Bas : l’euthanasie autorisée pour les enfants de moins de 12 ans). En Belgique, tous les enfants peuvent y avoir recours.

Dans l’Oregon, le délai d’attente de 15 jours a été supprimé et les personnes qui ne souffrent pas de maladies en phase terminale peuvent être éligibles au suicide assisté (cf. Suicide assisté : l’Oregon, un « exemple » aussi pour les dérives). De même en Suisse, le suicide assisté est une « option légale » y compris pour les patients ne souffrant pas d’une maladie réduisant leur espérance de vie. Enfin, les personnes souffrant de troubles psychiatriques peuvent désormais avoir recours au suicide assisté (cf. Colorado : un psychiatre propose l’aide médicale à mourir en cas d’anorexie mentale « terminale »). En 2021, 115 cas ont été enregistrés aux Pays-Bas.

Beaucoup parmi ceux qui demandent l’euthanasie ne veulent pas mourir, « mais échapper à leurs souffrances »

Alors que le concept d’autonomie de la personne est souvent mis en avant dans les discussions, le représentant du RCPI rappelle la position du Conseil national d’éthique du Danemark qui a rejeté la légalisation de l’euthanasie (cf. Danemark : le comité d’éthique s’oppose à l’euthanasie). « L’autonomie d’une personne ne peut être absolue et doit être mise en balance avec le risque de préjudice pour autrui », explique le Conseil en soulignant que « la présence d’une offre d’euthanasie risque de modifier de manière décisive les conceptions de la vieillesse, l’arrivée de la mort et la qualité de vie » (cf. Pays-Bas : le suicide assisté après une « vie accomplie » de retour au Parlement).

En effet, comme le prouvent les données de l’Oregon pour l’année 2022, la diminution de la capacité à participer à des activités qui rendent la vie agréable, la perte d’autonomie et la perte de dignité sont les trois premières préoccupations de fin de vie les plus fréquemment signalées (cf. Oregon : un « record » de suicides assistés en 2022). Le contrôle inadéquat de la douleur n’est qu’en sixième position. La sensation d’être un « fardeau » pour sa famille ou ses amis est l’une des principales raisons qui poussent les habitants de l’Oregon à avoir recours au suicide assisté. Les préoccupations financières sont aussi l’une d’elles. Pourtant « de nombreuses personnes qui demandent une assistance au suicide ou l’euthanasie ne veulent pas mourir, mais échapper à leurs souffrances » constate le représentant du RCPI.

« Aucune législation ne peut protéger de manière adéquate les membres vulnérables de la société » conclut-il.

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