Embryons congelés : des « biens » soumis aux dispositions contractuelles en cas de divorce

Publié le 17 Juil, 2023

Dans une affaire de divorce, la Cour d’appel du Maryland a considéré que l’accord initialement conclu par un couple pour donner à leurs embryons congelés une chance de vivre « quoi qu’il arrive » reste contraignant, même si le mari et la femme se séparent.

Après avoir eu un enfant par fécondation in vitro (FIV), les époux conservaient un embryon congelé.

Le mari, Joshua P., voulait que l’embryon soit détruit. Il ne souhaitait pas que sa femme l’utilise pour avoir un autre enfant après leur divorce (cf. Justice : les embryons congelés, un bien matrimonial voué à la destruction ?).

Jocelyn P., son épouse, a, elle, demandé à conserver l’embryon et à l’utiliser pour donner naissance à un deuxième enfant (cf. Une Canadienne divorcée obtient la propriété de son embryon congelé mais doit dédommager son ex-mari de 50 % de la valeur d’achat). Elle a rappelé avoir eu « des traitements de fertilité épuisants qui ont nécessité une intervention chirurgicale, des injections d’hormones avec des effets secondaires importants et des “centaines” de rendez-vous médicaux qui l’ont obligée à travailler à temps partiel » (cf. FIV : un risque accru de morbidité maternelle sévère). Selon son médecin, ses chances de donner naissance à un enfant, si elle a de nouveau recours à la FIV, sont en outre beaucoup plus faibles que si elle utilise l’embryon congelé.

Donner à tous les embryons « une chance de vivre »

La femme a également rappelé que le couple avait convenu que les embryons congelés seraient utilisés « quoi qu’il arrive ». Joshua, son mari, a reconnu avoir été d’accord pour donner à tous les embryons « une chance de vivre », mais il a déclaré qu’il n’avait pas envisagé la possibilité d’un divorce lorsqu’il a conclu l’accord.

Un juge du Baltimore County Circuit Court a initialement statué en faveur de l’époux, estimant que le couple ne s’était pas spécifiquement mis d’accord sur ce qu’il adviendrait de leurs embryons en cas de divorce (cf. Embryons congelés : le casse-tête des cliniques, le dilemme des parents).

La Cour d’appel a infirmé cette décision, estimant que l’accord initialement conclu concernant les embryons congelés restait contraignant, même après la séparation du couple. Elle a accordé le dernier embryon congelé à l’épouse, Jocelyn P. « Bien que nous ne soyons pas insensibles à la position de Joshua, le fait qu’il regrette maintenant d’avoir conclu l’accord ne justifie pas que l’on s’écarte de ses termes clairs » a indiqué la juge Andrea M. Leahy qui a examiné l’affaire.

Les juges ont en outre prévu une nouvelle audience pour déterminer les droits et obligations des deux parents en cas de naissance d’un deuxième enfant.

Au Texas, les embryons congelés ne sont pas « des enfants à naitre » ?

Dans une affaire similaire, une Cour d’appel du Texas a décidé de confirmer le jugement du tribunal de première instance et d’accorder les trois embryons congelés restants au père. La mère a, elle, été dessaisie de tout droit sur les embryons.

Dans cette affaire, le couple avait signé un accord avec la clinique de FIV. Celui-ci prévoyait qu’en cas de divorce les embryons conservés seraient à la disposition du mari. Les termes de cet accord sont « clairs et sans ambiguïté » considèrent les juges. Il est donc « exécutoire en tant que contrat ».

Il n’existe pas au Texas de loi concernant le « statut juridique des embryons fécondés, congelés, et conservés à l’extérieur du corps humain avant leur implantation ». Contrairement à ce que soutenait la mère, la Cour d’appel précise dans sa décision que les embryons congelés du couple ne sont pas « des enfants à naitre », mais « des biens soumis à des exigences contractuelles entre les parties » (cf. Embryons congelés : « Ce n’est pas un objet en garde-meuble, c’est une vie ! »).

Complément du 21/09/2023 : Le 18 septembre 2023, dans l’affaire Smith c. Smith, la Cour d’appel de l’Etat de Géorgie a estimé que l’embryon du couple divorcé devait faire l’objet d’un « don d’embryons ». En effet, dans l’« accord pour la cryoconservation des embryons et/ou des ovocytes » signé en 2020 par les Smith, le couple avait prévu cette option en cas  d’« incapacité de s’entendre sur une disposition future ».

 

Sources : Daily Record, Madeleine O’Neill (07/07/2023) ; Courthouse News Service (14/07/2023) ; Above the Law, Ellen Trachman (20/09/2023)

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