« Aide active à mourir » : le Sénat dit non

28 Juin, 2023

Alors que le Gouvernement doit présenter avant le 21 septembre prochain un projet de loi sur la fin de vie, un rapport publié par la Commission des affaires sociales du Sénat ce mercredi réaffirme la position de la majorité sénatoriale favorable à un renforcement de la loi Claeys-Leonetti mais opposée à l’« aide active à mourir » (cf. Fin de vie : le Sénat mène aussi des travaux).

Une « réponse inappropriée et dangereuse »

Dans un rapport sans concession intitulé « Fin de vie : privilégier une éthique du soin », les sénatrices LR Christine Bonfanti-Dossat et Corine Imbert, rapporteurs de la mission, qualifient l’« aide active à mourir » envisagée par le Gouvernement de « réponse inappropriée et dangereuse à une demande diffuse et équivoque ». De son côté, Michelle Meunier (SOC) a émis une opinion dissidente (cf. Fin de vie : les réticences du Sénat). Elle se positionne en faveur d’une évolution législative que ce soit vers le suicide assisté ou l’euthanasie.

Le consensus est très large sur la nécessité de développer les soins palliatifs à la fois dans le monde politique et médical (cf. Fin de vie : Les soins palliatifs, « parent pauvre de la médecine »). En revanche, c’est l’éventuelle évolution législative et le rôle des professionnels de santé dans le processus qui font débat. Un constat remarqué avec l’avis du CCNE (cf. Avis du CCNE : en marche vers l’”aide active à mourir” ?) et les conclusions de la Convention citoyenne sur la fin de vie (cf. Fin de vie : une convention manipulée ?).

Privilégier le développement des soins palliatifs

Dans son rapport, la majorité sénatoriale a également remis en cause le cadrage du débat qui aurait nui à sa « clarté » en multipliant les « lieux de réflexion » (cf. Fin de vie : la Conférence nationale de santé donne également son avis, Fin de vie : un processus construit pour aboutir à légaliser l’euthanasie ?). Entre l’avis du Parlement (cf. Clap de fin pour la mission parlementaire d’évaluation de la loi Claeys-Leonetti), celui de la Convention citoyenne (cf. Fin de vie : La Convention citoyenne rend sa copie) et celui du CESE (cf. Fin de vie : nouvel avis du CESE en faveur de l’euthanasie et du suicide assisté), les voix se sont multipliées. Pourtant, la situation de la fin de vie en France « n’exige pas » de nouvelle loi, conclut le rapport en affirmant que « les soins palliatifs seraient en capacité de répondre aux souffrances de patients et à la prise en charge nécessaire en fin de vie ». Pour cela il faudrait que la population et les professionnels de santé soient informés.

La « périlleuse » ouverture de l’« aide active à mourir »

Les sénatrices LR estiment que l’ouverture de l’« aide active à mourir » serait « périlleuse à de nombreux égards » que ce soit sur la question de l’intervention des soignants dans le processus ou sur la difficulté de définition des critères encadrant la procédure (cf. Fin de vie : un « dialogue de sourds » entre les soignants et le gouvernement). Elles soulignent les exemples étrangers comme celui de la Suisse (cf. Fin de vie : « voyage d’observation » en Suisse). « L’acte lui-même est accompli avec l’assistance d’acteurs privés et le contrôle des actes pratiqués par les associations semble minimal » expliquent-elles. Concernant la Belgique le rapport identifie un « défaut d’équilibre » aboutissant à « garnir la commission [qui examine les dossiers] de membres connus pour leur engagement militant en faveur de l’euthanasie » (cf. Euthanasie pour « dépression incurable » : la CEDH ne soulève qu’un problème de procédure).

Une « banalisation » de la mort

Enfin, « l’offre crée sa propre demande » (cf. Légaliser l’euthanasie : « une incitation au désespoir »). Un constat soulevé dans le rapport en s’appuyant sur l’exemple des Pays-Bas où, entre 2007 et 2010, le nombre de décès a doublé. Puis à nouveau entre 2010 et 2015. Christine Bonfanti-Dossat et Corinne Imbert ont remarqué une « banalisation de nature à brouiller quelques repères sociaux fondamentaux ». Elles appellent à « privilégier la sollicitude au nihilisme » dans le « modèle français de fin de vie » (cf. Une société vraiment fraternelle : le « modèle français » de la fin de vie ; « Etre regardés, soulagés, accompagnés, mais pas tués »). Une position partagée avec le ministre des Solidarités, Jean-Christophe Combe (cf. Fin de vie : attention au message envoyé aux personnes vulnérables) mais opposée à celle d’Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l’Organisation territoriale et des Professions de santé (cf. Fin de vie : Agnès Firmin le Bodo esquisse le futur projet de loi). Le Gouvernement semble divisé sur la question (cf. Fin de vie : le ministre de la Santé vraiment réticent ?).

 

Source : Public Sénat, Louis Mollier-Sabet (28/06/2023)

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