PMA post-mortem : le Conseil d’Etat interdit l’exportation de gamètes à l’étranger

Publié le 9 Juin, 2023

Dans un arrêt du 17 mai 2023, le Conseil d’Etat rejette la demande d’une jeune femme d’exporter les gamètes de son défunt mari pour avoir recours à la procréation médicalement assistée à l’étranger, malgré leur projet parental « clairement exprimé, construit et réfléchi ».

Violation du droit à la vie privée ? 

Atteint d’un cancer de la langue et en prévision d’un traitement par chimiothérapie, le jeune époux, marié depuis le 18 juin 2022, avait procédé au dépôt de ses gamètes au centre d’étude et de conservation des œufs et du sperme (CECOS) du CHU de Lille.

Après son décès, le 28 juin 2022, sa femme a demandé le transfert de ses gamètes vers un établissement étranger (cf. La PMA post-mortem, une fabrique à orphelins). Sa requête a été rejetée par le tribunal administratif de Lille le 13 avril 2023, puis par l’Agence de la biomédecine, et par le CHU de Lille. La jeune femme a donc saisi le Conseil d’Etat.

Elle estime que cette décision va à l’encontre de son droit au respect de la vie privée et familiale, garanti par l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

PMA post-mortem : une pratique prohibée en France

Son argumentation est rejetée par le Conseil d’Etat qui se fonde sur l’article L 2141-2 du code de la santé publique selon lequel le décès d’un des membres du couple fait obstacle à l’insémination ou au transfert des embryons. Il cite également l’article L 2141-11-1 du même code qui interdit l’exportation de gamètes conservés en France, s’ils sont destinés à être utilisés, à l’étranger, à des fins qui sont prohibées sur le territoire national (cf. Loi de bioéthique : ROPA, PMA post-mortem, le gouvernement a posé ses limites).

En vertu de ces deux articles, le Conseil d’Etat considère que « la conservation de gamètes ne peut être autorisée en France qu’en vue de la réalisation d’une assistance médicale à la procréation entrant dans les prévisions légales du code de la santé publique ». « Est notamment interdite en France l’insémination artificielle en cas de décès du conjoint ayant procédé à la conservation de ses gamètes en vue d’une procréation artificielle, à la suite de son décès, par le membre du couple survivant » complète-t-il (cf. PMA post-mortem : le Conseil d’Etat refuse le transfert des embryons).

Une décision en accord avec la CEDH 

Concernant la compatibilité de ces dispositions avec l’article 8 de la convention, le Conseil d’Etat relève la marge d’appréciation dont dispose chaque Etat pour l’application de celle-ci. Par conséquent, « l’interdiction d’une insémination artificielle à la suite du décès du conjoint ne porte pas, par elle-même, une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale ». Une décision qui se rapproche de le jurisprudence de la CEDH, notamment de l’arrêt Pejřilová c. République tchèque (cf. Pour la CEDH, il n’existe aucun droit à la PMA « post-mortem », CEDH : l’accès à la PMA post-mortem relève du droit national).

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