L’ABM en campagne pour le don de gamètes

Publié le 13 Oct, 2023

Le 13 octobre, l’Agence de la biomédecine (ABM) a annoncé le lancement d’une nouvelle campagne incitant au don de gamètes : #Faitesdesparents.

La campagne a pour objectif de « recruter rapidement et massivement de nouveaux donneurs de gamètes aux profils diversifiés pour faire face à la hausse des demandes de prise en charge en AMP avec don de gamètes » explique l’ABM.

Une explosion des demandes et un stock de gamètes limité

Depuis l’ouverture de la PMA à toutes les femmes, sans motif médical (cf. PMA pour toutes : les contorsions du droit en matière de filiation), « il y a eu une explosion de la demande » qui a été multipliée par huit reconnait Marine Jeantet, directrice générale de l’ABM (cf. PMA pour toutes : 22.800 demandes de première consultation et 21 bébés). Fin mars 2023, près de 6.200 demandes en vue d’une PMA avec don de spermatozoïdes étaient en attente, dont 41% concernaient deux femmes, 40% des femmes célibataires et 19% des couples. « A ce stade, nous ne savons pas s’il s’agit d’un effet de rattrapage ou si la demande va rester à ce niveau » précise Marine Jeantet. L’Agence pointe également la « proportion très forte de femmes seules » parmi les demandeuses.

La loi de bioéthique a aussi autorisé l’accès aux origines des enfants nés d’une PMA (cf. PMA : La France lève partiellement l’anonymat des donneurs). Depuis, les « nouveaux stocks » de gamètes sont encore faibles (cf. Banques de gamètes : la loi de bioéthique a chamboulé les équilibres).

A compter du 31 mars 2025, les stocks de gamètes constitués avant l’entrée en vigueur de la dernière loi de bioéthique ne pourront en outre plus être utilisés alors qu’ils sont pourtant les plus nombreux (cf. Accès aux origines : les gamètes « ancien régime » prolongés jusqu’en 2025). L’Agence de la biomédecine entend donc aussi trouver de nouveaux donneurs pour « reconstituer les stocks de gamètes issus de donneurs ayant consenti à l’accès à leur identité » si un enfant né par PMA avec tiers donneur en fait la demande à sa majorité.

« Faire des parents », mais pas « faire un enfant »

La nouvelle campagne de l’ABM a débuté le 11 octobre et s’achèvera à la fin de l’année. Elle sera particulièrement visible dans les villes dans lesquelles se situent un centre de dons de gamètes.

Un vaste dispositif de communication est prévu. Il comprendra des vidéos, diffusées notamment sur les réseaux sociaux et dans les cinémas, ainsi que des affiches destinées à la presse, aux cabinets médicaux ou aux universités. L’Agence de la biomédecine collabore également avec différents influenceurs.

De jolies photos, de l’humour, l’ABM entend jouer la carte de la complicité et de la sensibilité.

« Vous ne voulez pas faire d’enfants ? #FaitesDesParents », « donnez des gamètes, vous ferez des heureux » tels sont les slogans de cette nouvelle campagne. Misant sur les bons sentiments, l’ABM insiste et explique : « en donnant vos spermatozoïdes ou vos ovocytes, vous offrez à d’autres le bonheur d’être parents ».

« Donner ses gamètes, ce n’est pas faire un enfant. C’est faire des parents » martèle l’ABM. Une rhétorique altruiste qui se veut rassurante, et banalise le don. La réalité n’est pas si simple. Aujourd’hui, les enfants nés de PMA peuvent notamment accéder à l’identité du donneur (cf. PMA : 434 demandes d’accès aux origines depuis 2022).

Les jeunes « plus enclins à donner » ?

L’ABM vise « les deux publics les plus enclins à donner » selon elle, les jeunes de 18 à 24 ans (cf. Dons de gamètes : les jeunes au cœur de l’attention), et les personnes de moins de 44 ans qui viennent d’avoir un enfant.

« Quand on est étudiant, on n‘a pas forcément envie d’avoir des enfants – du moins, pas dans l’immédiat. En revanche, rien n’empêche d’offrir à d’autres la possibilité d’être parents » explique l’Agence. Vous pourrez continuer « à profiter de tous vos vendredis soirs » comme « de toutes vos grasses mat’ », « à être le meilleur aux jeux vidéo ». Tels sont les messages des vidéos spécifiquement destinées aux étudiants. Mais est-ce bien responsable d’inciter ainsi des jeunes ? (cf. « Les jeunes », faux héros et vraies proies de notre époque)

Du coté des parents qui viennent d’avoir un enfant, l’ABM mise cette fois sur la connivence et l’émotion autour de la parentalité entre jeunes parents, parfois un peu débordés, et futurs parents qui rêveraient de vivre le même bonheur. Les bons sentiments, ou peut-être la culpabilité d’être parents quand d’autres ne le sont pas, suffisent-ils à faire croire qu’on peut « faire des parents » ? L’enfant serait-il un dû ?

Un parti pris inquiétant, une nouvelle banalisation du don de gamètes qui occulte les enfants issus de ces dons, mais aussi les difficultés du parcours. Informer ou influencer ?

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