Fin de vie : après la promotion du suicide, une soirée pour « réfléchir dans un autre sens »

9 Nov, 2023

Après le choix du service public de consacrer une soirée entière à promouvoir le suicide et la future loi sur l’« aide active à mourir » (cf. La promotion du suicide et de l’euthanasie en prime time sur le service public), un autre média, C8, a fait un choix différent. Mardi, il proposait la diffusion du documentaire Mourir n’est pas tuer [1]. Témoignages de soignants, de patients, investigations en Belgique et en Suisse : une enquête avec l’intention d’informer (cf. Géraud Burin des Roziers enquête au cœur de la fin de vie dans son nouveau documentaire). « C’est l’unique documentaire qui permet de réfléchir dans un autre sens » affirme la journaliste Christine Kelly qui a animé le débat suivant la diffusion du documentaire.

S’attaquer au messager faute de pouvoir s’attaquer au message

En plateau, Bernard de la Villardière, son producteur, le philosophe Damien Le Guay, Jeanne Amourous, infirmière en soins palliatifs, Muriel Derome, psychologue, ainsi que deux élus : Charles Rodwell, député Renaissance et Olivier Falorni, député Modem, ont débattu pendant quarante cinq minutes.

Dès le début, Olivier Falorni a choisi une méthode offensive en attaquant la fondation Jérôme Lejeune qui a contribué au financement du documentaire. Le but : « décrédibiliser le film en décrédibilisant son financeur » analyse Jean-Marie Le Méné, président de la fondation, qui était invité le lendemain par le groupe d’étude sur la fin de vie présidé par le député (cf. Fin de vie : légaliser l’euthanasie n’est « pas un progrès, mais un catafalque social »). Un droit de réponse sans caméras et sans public, hormis les quelques trente députés présents.

« S’attaquer au messager faute de pouvoir s’attaquer au message. Rester sur la forme pour éviter le débat de fond qui effectivement n’a pas eu lieu » déplore Jean-Marie Le Méné. « J’en tire la conséquence que vos arguments en faveur d’une loi légalisant l’euthanasie ne sont peut-être pas si solides sur le fond » argumente-t-il face au député.

Rappeler la réalité des soins palliatifs

Alors que les militants de l’euthanasie utilisent une rhétorique qui ose l’expression d’« acharnement palliatif », les soignants invités à débattre ont témoigné de leur quotidien.

Jeanne Amourous, infirmière en soins palliatifs, rappelle que ces soins ne concernent pas que la fin de vie. « Ils permettent de se décentrer de la maladie pour se recentrer sur le malade ». « Les patients ne nous demandent pas à mourir mais demandent à être soulagés, affirme-t-elle. La pulsion de mort côtoie la pulsion de vie tous les jours. Il y a une vraie compétence médicale de soulagement de la douleur ». Charles Rodwell considère que « la France n’a pas assuré son choix pour les soins palliatifs jusqu’au bout ». « C’est réparer cette injustice qui doit être notre priorité », juge-t-il.

« La mort doit beaucoup plus faire partie de la vie », interpelle de son côté la psychologue Murielle Derome (cf. La force du paradoxe : comment les plus fragiles révèlent la puissance de « l’envie de vivre »). « Ce qui est important quand on accompagne un proche c’est que certains vont donner envie de vivre à ceux qui restent » (cf. « Savourez chaque instant »).

Des risques patents

Alors qu’Emmanuel Macron avait promu le « modèle belge » (cf. Présidentielles : Emmanuel Macron favorable à l’euthanasie), Damien Le Guay pointe au contraire qu’il « montre toutes ses limites ». D’ailleurs la Belgique a été condamnée par la CEDH pour son absence de contrôle (cf. Euthanasie pour « dépression incurable » : la CEDH ne soulève qu’un problème de procédure) et « 50% des euthanasies en Belgique ne sont pas déclarées », affirme le philosophe.

Pour Bernard de la Villardière, la légalisation de l’euthanasie risque de « modifie[r] la perception de la grande vieillesse ». Pourquoi la gauche défend-elle « cette loi qui prône l’individualisme, créera des inégalités et repose sur des problématiques économiques » ?, s’étonne-t-il.

« Interroger notre rapport à notre humanité, à notre liberté »

Charles Rodwell considère que ce débat a eu « le mérite d’interroger notre rapport à notre humanité, à notre liberté ». Mais « qu’est-ce qu’une liberté qui, lorsque vous vous en saisissez disparaît ? », questionne-t-il.

« Nous avons entendu tous les points de vue ce soir, ce qui n’est pas toujours le cas, ni sur les plateaux, ni dans les documentaires », a conclu Christine Kelly. « Et si mourir dans la dignité c’était se battre, aidé dans la disparition de la souffrance, se battre jusqu’au dernier souffle en dignité ? »

 

[1] Disponible en replay jusqu’au 15/11

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