Un article publié dans la revue Cell Stem Cell [1] décrit la « première étude scientifique » visant à développer des blastoïdes, aussi appelés « embryons synthétiques », à partir de cellules souches pluripotentes (CSP) bovines [2]. Les blastoïdes visent à reproduire les blastocystes, c’est-à-dire des embryons après 4 à 7 jours de développement (cf. « Blastoïdes » : une nouvelle étude, les mêmes arguments). Les chercheurs affirment qu’ils peuvent être utilisés à court terme pour modéliser le développement embryonnaire des bovins [3]. Mais pas seulement.
De nouvelles perspectives pour l’élevage
« Les cellules souches étant faciles à manipuler, il est possible de modifier des gènes spécifiques et d’en étudier les effets », explique Ana Elisa Ribeiro Orsi, chercheuse à l’Institut de biosciences de l’Université de São Paulo (IB-USP) et l’un des auteurs de l’article. « A long terme, nous pensons que les blastoïdes peuvent être perfectionnés au point de permettre une gestation complète. Cela faciliterait l’élevage à grande échelle de bovins présentant les caractéristiques souhaitées », anticipe-t-elle.
Les chercheurs affirment que « les blastoïdes sont similaires aux embryons bovins en termes de morphologie et d’expression génétique caractéristique ». « Ce que je préfère, c’est que lorsque nous avons transféré les blastoïdes dans des vaches, nous avons détecté de l’interféron-tau dans leur sang », souligne Ana Orsi. Or « l’interféron-tau est une hormone qui indique la reconnaissance maternelle de la grossesse chez les bovins », explique-t-elle.
Une même technique mais un potentiel différent ?
Dans cette étude, les chercheurs ont travaillé sur des blastocystes trois, cinq et sept jours après la fécondation dans des cellules de souris, d’homme et de bovin respectivement.
« L’aspect le plus passionnant de cette recherche pour moi est la capacité des CSP à s’organiser in vitro et à reprendre le développement de l’embryon », a déclaré Lygia da Veiga Pereira, professeur au département de génétique et de biologie évolutive de l’IB-USP. Directrice de la thèse d’Ana Orsi, elle est par ailleurs membre du conseil d’administration de la Société internationale de recherche sur les cellules souches (ISSCR). Alors il faut s’empresser de rassurer.
Ainsi l’article cite le communiqué de presse publié par l’ISSCR le 27 juin 2023 (cf. Recherche sur l’embryon : l’ISSCR joue sur les mots) : « les modèles d’embryons intégrés ne sont ni synthétiques ni des embryons. Bien que ces modèles puissent reproduire certains aspects des premiers stades de développement des embryons humains, ils ne peuvent pas se développer et ne se développeront pas jusqu’à l’équivalent du stade postnatal chez l’homme ». Mais ils pourraient le faire chez les bovins ? Et les chercheurs y travaillent.
[1] Pinzón-Arteaga, C. A., et al. (2023). Bovine blastocyst-like structures derived from stem cell cultures. Cell Stem Cell. doi.org/10.1016/j.stem.2023.04.003.
[2] News medical, Researchers create “synthetic embryos” from bovine pluripotent stem cells, Megan Craig (26/07/2023)
[3] Ils ont été cultivés in vitro « plus de deux semaines »
