Cellules souches humaines : L’ISSCR met à jour les normes pour la recherche

Publié le 13 Juin, 2023

La Société internationale de recherche sur les cellules souches (ISSCR) vient de publier de nouvelles normes [1] pour l’utilisation des cellules souches humaines à des fins de recherche (cf. Recherche sur l’embryon : plus aucune limite ?).

« Ces normes sont des recommandations pratiques visant à améliorer la reproductibilité de la recherche sur les cellules souches au sein d’un même laboratoire, d’un laboratoire à l’autre et d’une lignée cellulaire à l’autre », précise le résumé du rapport. Pour l’organisme, rigueur et reproductibilité ne sont pas encore constatés dans ce domaine de recherche. Les recommandations de l’ISSCR se déclinent en cinq parties : 1) la caractérisation de base des cellules [2], 2) l’évaluation de l’état indifférencié et de la pluripotence, 3) la caractérisation génomique, 4) les modèles basés sur les cellules souches, tels que les organoïdes, et 5) le reporting.

L’éthique grande absente

Bien qu’il s’agisse de recherche sur des cellules souches humaines, embryonnaires ou pluripotentes induites (iPS), le rapport n’aborde pas les questions éthiques relatives à ce type de recherche. A de très rares exceptions près.

Ainsi, dans la section 2, où il s’agit de vérifier la pluripotence des lignées cellulaires, quelle que soit leur origine, l’ISSCR rappelle que « dans le cas des cellules souches embryonnaires de souris, la pluripotence a été démontrée par la capacité des cellules à participer au développement lorsqu’elles sont transférées dans un blastocyste [3] que l’on laisse se développer jusqu’à son terme ». « Pour des raisons éthiques évidentes, un tel test n’est pas possible pour les cellules souches pluripotentes humaines, poursuit le rapport, de sorte que la pluripotence doit être démontrée par des tests de substitution. »

Ces tests sont « la capacité à former des tératomes contenant des tissus des trois feuillets embryonnaires [4] lorsqu’ils sont autorisés à former des tumeurs par xénogreffe [5], ou par la différenciation in vitro ». Des tests qui, pour l’ISSCR, ne semblent pas présenter de problèmes éthiques évidents. L’embryon serait-il foncièrement différent en fonction de l’endroit où on le fait se développer ?

L’évocation du bien être animal

L’instance interroge également l’éthique de la pratique de la xénogreffe. Pour des questions de bien-être animal.

Dans sa recommandation 2.1.2, l’ISSCR précise que « les essais de xénogreffe ne sont pas nécessaires pour indiquer la pluripotence ».

« Bien que la xénogreffe de cellules souches pluripotentes dans des animaux immunodéprimés constitue un test solide de la pluripotence et ait été largement utilisée dans le passé, les préoccupations relatives au bien-être des animaux et les nouvelles réglementations sur ce sujet dans différentes juridictions rendent cet essai non souhaitable », argumente l’organisme qui invite à privilégier les essais in vitro.

Des manipulations génétiques non maîtrisées

Dans la troisième section, consacrée à la caractérisation génomique, l’ISSCR souligne que « toutes les méthodes actuelles d’édition/de correction génétique risquent d’introduire des modifications génétiques involontaires » (cf. CRISPR-Cas9 : des effets « off target » plus nombreux et difficiles à détecter). Dès lors, « les chercheurs doivent prendre les mesures nécessaires pour identifier les modifications génétiques et sélectionner les lignées pour la caractérisation phénotypique dans lesquelles ces mutations communes ou rares n’ont pas été introduites ».

Des cellules souches transférées, modifiées, caractérisées, sans considération vis-à-vis de l’embryon dont elles sont parfois issues, et qui a été détruit pour permettre ces recherches. Des cellules, véritable matériau de laboratoire, pour lesquelles les chercheurs ne semblent pas avoir beaucoup de considération. Hormis l’objectif d’assurer la reproductibilité de leurs expériences.

 

[1] International Society for Stem Cell Research, Standards for Human Stem Cell Use in Research, juin 2023.

[2] Dans cette section, l’ISSCR rappelle par exemple que « les réglementations peuvent varier d’une région à l’autre en ce qui concerne l’utilisation du matériel et des données associées ». Dès lors, les échantillons et lignées cellulaires doivent être transférés d’un laboratoire à l’autre « à l’aide d’accords de transfert appropriés » (Recommandation 1.1.1).

[3] Embryon âgé de 5 jours environ

[4] l’ectoderme (qui donnera notamment la peau et le système nerveux), le mésoderme (les muscles, les os, certains organes internes) et l’endoderme (l’intestin et autres organes internes)

[5] Greffe inter-espèces

Photo : iStock

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