Belgique : condamnation d’un médecin suite à une « erreur de sperme »

Publié le 13 Fév, 2023

En janvier, un ancien médecin de Bruges a été condamné par la Cour d’appel de Gand suite à l’insémination artificielle d’une femme avec les « mauvais » gamètes.

Un couple flamand avait eu recours à une insémination artificielle avec ce qui devait être le sperme du mari, en raison de problèmes de fertilité chez lui. Ils ont donné naissance à un fils en 1983.

« Des doutes sur mes origines »

« Mes parents ont toujours supposé que j’étais biologiquement le leur, explique leur fils désormais adulte. En principe, je n’avais pas non plus de raison de douter de mes origines. Même si j’ai été surpris de ne pas avoir de ressemblance physique avec mon père. » « Pendant longtemps, j’ai lutté avec des doutes sur mes origines, jusqu’à ce que je veuille une réponse définitive » témoigne-t-il (cf. A l’origine du mal-être d’une jeune mère : son bébé, né par PMA, ne lui ressemble pas).

En 2019, un test lui révèle que son père n’est pas son père biologique. Il se découvre en effet un « demi-frère biologique ». « Il a été conçu par insémination par donneur anonyme dans le même hôpital que celui où mes propres parents avaient été soignés, explique-t-il. Cela ne pouvait pas être une coïncidence. Il était inévitable que j’aie aussi été conçu avec du sperme de donneur ».

Suite à cette erreur, il décide de porter plainte contre le médecin qui a procédé à l’insémination (cf. 24 ans après, une famille découvre qu’une clinique de fertilité a utilisé le sperme d’un étranger pour concevoir leur enfant, ils l’attaquent en justice).

La « négligence du médecin »

En première instance, le tribunal a considéré qu’il n’était pas démontré « que le médecin avait altéré le sperme » et qu’il ne pouvait être exclu que l’enfant « soit né d’une relation adultère ».

En appel, la Cour a cette fois estimé que « rien ne prouve que la mère aurait connu le père biologique ». Pour les magistrats, le sperme a été échangé ou mélangé avec du sperme de donneur à l’insu des parents . « Cela ne peut être arrivé qu’en raison de la négligence du médecin » concluent-ils.

La Cour a accordé 2 500 euros de dommages et intérêts pour préjudice moral à l’enfant. Selon lui, le plus important est toutefois qu’il soit écrit « noir sur blanc » que le médecin a commis une erreur. « Ce fut un choc pour moi de découvrir après toutes ces années que mon père n’est pas mon père biologique », explique-t-il.

Un « risque inhérent » aux techniques de PMA

Après enquête, l’enfant s’est découvert cinq demi-frères et sœurs conçus avec le sperme du même donneur.

« Les erreurs d’attribution de sperme, d’ovocytes ou même d’embryons sont une réalité. Elles font ressurgir à chaque fois l’épineuse question du risque inhérent à ces techniques de procréation artificielle qui (..) dissocient l’acte sexuel de la procréation » rappelle l’Institut européen de bioéthique (cf. PMA : des techniques à risque). L’Institut souligne aussi « l’importance de pouvoir s’inscrire dans une généalogie qui confirme la filiation » pour éviter les troubles identitaires liés à une telle confusion (cf. PMA, vers des schémas de filiation invraisemblables ?).

Cette condamnation d’un médecin intervient alors que la Belgique envisage de lever l’anonymat des donneurs de gamètes (cf. PMA : La France lève partiellement l’anonymat des donneurs) et explique faire face à une « pénurie de donneurs de sperme » qui la conduisent à importer depuis le Danemark les deux-tiers de ses « stocks ».

 

Sources : Nieuwsblad, Arne Franck (16/01/2023) ; Institut européen de bioéthique, Erreur de sperme dans une insémination artificielle en Belgique : quelle responsabilité du médecin ? (08/02/2023) ; Dhnet, Ludovic Jimenez (11/02/2023)

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