Xénotransplantation : un homme reçoit un cœur de porc

Publié le 11 Jan, 2022

Aux Etats-Unis, des chirurgiens ont transplanté le cœur d’un porc génétiquement modifié à un homme. « Une première mondiale », selon Bartley Griffith, le chirurgien l’école de médecine de l’université du Maryland qui a réalisé l’intervention.

David Bennett, âgé de 57 ans, a été opéré vendredi dernier. Il « avait été déclaré inéligible à recevoir une greffe humaine ». Suite à cette transplantation, il est « étroitement suivi par les médecins pour s’assurer que le nouvel organe fonctionne correctement », ainsi que pour identifier d’éventuelles infections [1]. « C’était soit la mort, soit cette greffe, a déclaré David Bennett. Je veux vivre. Je sais que c’est assez hasardeux, mais c’était ma dernière option. »

Karen Maschke, chercheuse au Hastings Center, qui travaille au développement de recommandations éthiques et politiques pour les essais cliniques, estime de son côté qu’il est « crucial » de recueillir de plus amples informations suite à cette intervention, avant de « se précipiter » dans d’autres opérations.

Dix modifications génétiques

La xénotransplantation [2] a été approuvée par la Food and Drug Administration américaine (FDA) le 31 décembre dernier. Une « autorisation d’urgence » d’« usage compassionnel ».

Le porc âgé d’un an dont on a prélevé le cœur a subi 10 modifications génétiques. Quatre gènes ont été supprimés, ou désactivés, dont un qui code pour une molécule provoquant une importante réaction de rejet chez l’homme. Un gène de croissance a également été inactivé pour empêcher le cœur du porc de continuer à se développer après son implantation. Enfin, six gènes humains ont été insérés dans le génome du porc donneur. Des modifications « destinées à rendre les organes porcins plus tolérables pour le système immunitaire humain ». Ces modifications ont été réalisées par l’entreprise Revivicor, la société qui avait fourni le rein de porc connecté aux vaisseaux sanguins d’une patiente en état de mort cérébrale en octobre (cf. Xénogreffe : un rein de porc « transplanté » chez une femme en état de mort cérébrale ; Xénotransplantation : une deuxième expérience chez l’homme).

En complément des médicaments anti-rejet « habituels », David Bennett s’est également vu administrer « un nouveau médicament expérimental » produit par l’entreprise Kiniksa Pharmaceuticals, afin d’« inhiber le système immunitaire et empêcher que le corps rejette l’organe ».

Des tentatives de xénogreffes

Aux Etats-Unis, 110.000 personnes sont inscrites sur les listes d’attente pour une greffe d’organe. 3.800 cœurs ont été transplantés l’année dernière. « Un nombre record », selon le United Network for Organ Sharing.

Les xénogreffes font l’objet d’expériences depuis de nombreuses années, au départ avec des primates. Dans les années 60, des reins de chimpanzés ont été transplantés à des patients. Celui qui a survécu le plus longtemps a supporté la greffe 9 mois. Et un cœur de babouin a été transplanté à un bébé en 1984 qui n’a survécu que 21 jours. Les porcs sont désormais privilégiés pour les xénotransplantations, « en raison de leur taille, de leur croissance rapide et de leurs portées, qui comptent beaucoup de petits ». En effet, des organes de « taille humaine » peuvent être obtenus en 6 mois. Les valves cardiaques de porc sont déjà utilisées chez les êtres humains, et leur peau est parfois greffée chez de grands brûlés (cf. Greffe de peau de porc à l’homme : un essai mené aux Etats-Unis). Une utilisation à laquelle s’opposent les défenseurs des droits des animaux.

 

[1] Dont le rétrovirus porcin, transmissible du porc à l’homme

[2] Greffe d’un organe provenant d’une espèce à un receveur d’une autre espèce

Sources : AFP (11/01/2022) ; Washington Times, Carla K. Johnson (10/01/2022) ; New York Times, Roni Caryn Rabin (10/01/2022) ; USA Today, Karen Weintraub (10/01/2022)

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