Le Distilbène à l’origine de dysphories de genre ?

Publié le 14 Mar, 2024

Une étude menée chez les enfants de mères exposées au Distilbène [1] conclut que « la prévalence du développement transgenre féminin est singulièrement élevée chez les enfants masculins dont les mères ont pris du DES pendant leur grossesse ». « Au sein du groupe des individus exposés au DES, l’incidence de la dysphorie de genre a été trouvée dans 1,58 % des cas, alors que sa fréquence dans la population contrôle est d’environ 1 sur 16 000 » indiquent les chercheurs. En outre, aucun des autres fils de mères d’enfants transgenres, issus du même père et non exposés au DES, n’est transgenre. Cette recherche a été publiée dans le Journal of Xenobiotics [2]

Une avalanche d’effets délétères

Le Distilbène est un œstrogène de synthèse qui a été utilisé pour prévenir les fausses couches de 1940 à 1977 en France. Il a été prescrit à 200 000 femmes enceintes. « Malformations, cancers, santé mentale, les effets délétères, y compris transgénérationnels, de la molécule ont fait l’objet de nombreuses études, certaines réalisées à partir de la cohorte Hhorages [3], forte de 1200 mères et près de 2000 enfants ». (cf. Distilbène : des répercussions aussi chez les petites-filles des patientes).

Le Distilbène, et « plus largement les perturbateurs endocriniens environnementaux », « modifie l’équilibre hormonal de la mère pendant la vie fœtale et agit sur les zones responsables de l’acquisition de l’identité de genre au début de la vie » expliquent le Dr Laura Gaspari et Charles Sultan, professeur émérite d’endocrinologie pédiatrique au CHU de Montpellier.

Un sujet qui « dérange »

« On a pris du temps pour écrire l’article, le sujet dérange » témoigne le Dr Gaspari. « La communauté médicale est très frileuse sur ces questions alors que la prévalence des troubles de l’identité de genre, susceptible d’apparaître dans l’enfance, augmente » indique-t-elle. « L’an dernier, quand le sujet a été abordé dans un congrès d’endocrinologie, nos recherches ont reçu un accueil glacial » raconte le médecin.

De son côté, Marie-Odile Soyer-Gobillard, mère de deux enfants nés sous DES, biologiste, ancienne directrice de recherche au CNRS et présidente de l’association Hhorages, « a mis sa cohorte de patients au service de la recherche, qu’il s’agisse des équipes d’endocrinologie pédiatrique ou de psychiatrie du CHU de Montpellier ou de l’équipe de psychiatrie moléculaire de l’hôpital Sainte-Anne à Paris ». En 2015, après avoir reçu trois premiers témoignages, elle présente un « article préliminaire » au colloque de gynécologie de Paris en 2016. « Il n’y a eu aucun retentissement indique la biologiste. Le sujet est très polémique, il faut être très prudent ». « C’est un travail pionnier, estime la scientifique et il était pour cela important d’associer Scott Kerlin à l’étude, il est à la tête de la principale association de patients DES aux Etats-Unis ».

 

[1] Le diéthylstilbestrol (DES)

[2] Early Female Transgender Identity after Prenatal Exposure to Diethylstilbestrol: Report from a French National Diethylstilbestrol (DES) Cohort, L Gaspari et al., J. Xenobiot. 2024, 14(1), 166-175; https://doi.org/10.3390/jox14010010

[3] La base de données a été mise en place par l’association Hhorages-France (Halte aux HORmones Artificielles pour les GrossessES), créée en 2002. Elle est inscrite au portail épidémiologique de l’Inserm. Les sujets transgenres de la cohorte « n’ont pas d’anomalie d’origine génétique », indiquent les médecins, ni « aucune malformation génitale significative, ni désordre de la différenciation sexuelle ».

Source : Midi Libre, Sophie Guiraud (12/03/2024)

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