La justice influence-t-elle la médecine ?

Publié le 14 Mai, 2003

Le Quotidien La Croix revient dans son supplément "Sciences et Ethiques" du 13 mai sur la judiciarisation de la médecine (cf revue de presse du 13/05/03).

Depuis plusieurs années, les dossiers en responsabilité médicale intéressent de plus en plus les avocats qui doivent de ce fait suivre de près l’actualité de la santé. Parmi ces avocats, on distingue ceux qui défendent les médecins et ceux qui défendent les victimes. Quoiqu’il en soit les procédures sont souvent longues, ce qui est parfois mal vécu par les victimes.

Interrogés sur cette question Roger Bessis, gynécologue-obstétricien et président du Collège français d’échographie foetale et Jean Guigne, président du tribunal de grande instance de Bobigny, nous font part de leur point de vue.

Roger Bessis souligne que dans les dernières affaires ce qui a beaucoup choqué les médecins, c’est le sentiment qu’ils étaient considérés comme "le payeur" le plus disponible qui devait soutenir financièrement les parents, victimes d’erreurs médicales. Aujourd’hui, il estime que "le mal est fait et que cela se ressent au niveau de certaines pratiques". Ainsi certains gestes ne sont plus pratiqués par peur d’une éventuelle condamnation. Par ailleurs, il estime que cette judiciarisation a modifié la relation médecin-patient. Par exemple dans le cas d’une échographie, les praticiens ne peuvent plus déclarer que tout va bien mais que simplement, ils n’ont rien trouvé. Cela reste donc très déstabilisant pour le patient. Enfin, il rappelle que l’échographie foetale est aujourd’hui menacée en France notamment par l’affaire Perruche, la hausse des primes d’assurance et le maintien à un niveau très bas des honoraires perçus en secteur 1.

En revanche, pour Jean Guigne, dire qu’il y a une explosion du nombre de poursuites, ne lui parait pas fondé. Il envisage même une prochaine baisse des poursuites contre les médecins à la suite de deux lois récentes.
En juin 2000, une première loi prévoyait "qu’en matière pénale, la responsabilité ne peut être retenue que lorsqu’il y a un lien parfaitement direct entre la faute et le dommage, à moins qu’on ne mette en évidence une faute d’une particulière gravité"
La loi du 4 mars 2002 prévoit, quant à elle, la mise en place d’un système d’indemnisation "de meilleure qualité " des victimes et la mise en place de la "solidarité nationale" pour les accidents sans faute. Rappelons que grâce à cette loi seul le préjudice moral des parents est indemnisé. 
Enfin, il rappelle que les médecins sont des personnes justiciables comme les autres.

Quant à Michel Kubler, journaliste à La Croix, il rappelle que "les soignants n’ont pas d’autre raison d’être que le service des soignés, mais que les patients, inversement, n’ont pas le droit d’exiger pour leur santé un résultat qu’ils peuvent légitimement espérer, au risque de paralyser la médecine."

La Croix 13/05/03

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