La directive 2001/18 encadre actuellement « la mise sur le marché, la traçabilité et l’étiquetage des cultures génétiquement modifiées. Et elle le fait si étroitement que les OGM sont à peu près absents, en Europe, et de l’alimentation humaine et des champs. » (Cf. Les plantes OGM : un problème pour la santé publique ?). La Commission européenne souhaite assouplir sa règlementation.
Depuis quelques années, nous assistons à la naissance des new breeding techniques (NBT) ou new genomic techniques (NGT). Ces nouvelles techniques d’édition du génome permettent d’apporter des modifications « plus subtiles » que la transgenèse. Cette dernière consiste en un « transfert d’un gène d’intérêt d’une espèce à une autre » (Cf. « New Breeding Techniques » : vers l’utilisation de « nouveaux OGM » qui ne disent pas leur nom ?).
La Commission européenne envisage de sortir certaines manipulations génétiques du « cadre qui réglemente aujourd’hui les OGM ». Cette proposition législative, prévue pour 2023, ne considérerait plus les NBT comme des OGM. Pour certains, cette dérégulation « favoriserait l’innovation et la mise au point de variétés adaptées aux changements climatiques, à la sécheresse, à certains ravageurs ou pourvues de meilleures qualités nutritionnelles ». Au contraire, d’autres considèrent que les NBT « peuvent provoquer des modifications génétiques imprévues et que des résultats comparables à ceux de ces technologies pourraient bien souvent être obtenus par des croisements de variétés traditionnelles » (Cf. NBT : les recommandations de l’OPECST).
Face à ces arguments, les Etats tiennent « un discours de progrès » et défendent « l’innovation ». L’agriculture occidentale a déjà connu des révolutions de la mécanisation, puis de la chimie. Depuis les années 1990, une révolution génétique est en cours, avec le développement des cultures OGM. La transgenèse devait « augmenter les rendements, rationaliser et réduire l’usage d’herbicides » des cultures de maïs, soja et coton tolérants au glyphosate.
Or, « l’usage systématique et généralisé du Roundup sur ces monocultures transgéniques a surtout favorisé la prolifération d’adventices résistantes au glyphosate qui a rapidement conduit à la remise en selle d’anciens herbicides réputés problématiques ». En effet, les quantités d’herbicides utilisées aux Etats-Unis avaient diminué entre 1996 et 2006. Selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), l’utilisation d’herbicides est passée de 184 000 tonnes en 2006, à 255 000 tonnes en 2012. De plus, « le problème de mauvaises herbes résistantes devient tel que les nouvelles semences transgéniques qui entrent sur le marché sont, en elles-mêmes, un terrible aveu d’échec ». Pour preuve de cette « fuite en avant », le nouveau maïs de Bayer a été modifié pour « tolérer 5 molécules d’herbicides ».
Source : Le Monde, Stéphane Foucart (28/11/2021)