IVG : les sages-femmes demandent la réécriture du décret, l’Exécutif obtempère

Publié le 4 Mar, 2024

Dans un communiqué de presse, l’Organisation Nationale Syndicale des Sages-Femmes (ONSSF) indique avoir soumis, le 15 février, à la ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités, un recours gracieux demandant l’abrogation du décret autorisant définitivement les sages-femmes à pratiquer des avortements chirurgicaux (cf. IVG instrumentales par des sages-femmes : encore une « expérimentation » pérennisée). Ce qui pose problème à l’ONSFF est que le texte impose que « l’organisation de l’établissement de santé permet[te] l’intervention, sur site et dans des délais compatibles avec les impératifs de sécurité des soins, d’un médecin compétent en matière d’interruptions volontaires de grossesse par méthode instrumentale, d’un gynécologue-obstétricien et d’un anesthésiste-réanimateur. Elle [doit aussi] permet[re] la prise en charge, sur site ou par convention avec un autre établissement de santé, des embolisations artérielles, dans des délais compatibles avec les impératifs de sécurité des soins, par des médecins justifiant d’une formation et d’une expérience dans la pratique de ces actes ».

L’organisation estime que cette disposition « pose une différence de traitement inacceptable entre professions médicales », « en restreignant la pratique de l’IVG instrumentale aux centres équipés pour prendre en charge des complications rarissimes ». La santé, la vie, des femmes ne méritent-elles pas toutes les précautions ? Faudrait-il faire des compromis au nom de « l’égalité entre corporations » ? Il semble que ce soit la volonté d’Aurore Bergé, ministre chargée de l’Egalité entre les femmes et les hommes et de la Lutte contre les Discriminations, qui a indiqué vouloir « sécuriser le fait que les sages-femmes puissent réaliser des IVG chirurgicales en plus des IVG médicamenteuses » [1]. L’organisation attend la réécriture du décret. La demande a également été formulée par l’Ordre des sages-femmes dans un communiqué aujourd’hui. Ce lundi, le cabinet de la ministre a confirmé que cela serait fait [2].

Dans son communiqué l’ONSSF, « se réjouit de voir prochainement gravé dans la Constitution “la Liberté garantie aux femmes d’avoir recours à l’interruption volontaire de Grossesse” », tout comme des « nouveaux tarifs concernant la réalisation des IVG » largement revalorisés par voie d’un décret publié le 2 mars. L’avortement est déjà remboursé à 100% pour toutes les femmes depuis 2013. Une meilleure prise en charge que les frais et les examens liés à la grossesse (cf. De la loi “Veil” à la loi “Gaillot”). L’ONSSF s’en inquiète-t-elle ? « Le vrai sujet à régler n’est pas de former davantage de sages-femmes à l’IVG instrumentale, mais plutôt de s’assurer qu’elles soient en nombre suffisant au côté des obstétriciens en salles d’accouchement », jugait le Dr Pascale Le Pors, vice-présidente du Syndicat national des gynécologues et obstétriciens de France (Syngof), lors de la publication du décret en décembre. De l’accompagnement des femmes pendant leur grossesse à l’avortement, les sages-femmes auraient-elles changé de « vocation » ?

Complément du 07/03/2024 : Le 7 mars, Catherine Vautrin, ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités, a déclaré lors d’une interview sur France 2 qu’ « à partir de fin mars », les sages-femmes pourront réaliser les interruptions volontaires de grossesse (IVG) instrumentales dans des conditions d’autonomie plus souples que celles prévues actuellement. La présidente du syndicat national des praticiens anesthésistes-réanimateurs, Anne Geffroy-Wernet, alerte toutefois sur les risques de complications graves. « Les IVG instrumentales pratiquées sous anesthésie générale peuvent être suivies d’hémorragies ou de perforation de l’utérus », prévient-elle. « Dans ces cas-là, il faut pouvoir agir vite » précise-t-elle. (Le Figaro, Clara Hidalgo, 06/03/2024 ; APM news 07/03/2024)

Complément du 24/04/2024 : Un nouveau décret paru au JO le 24 avril stipule que les sages-femmes justifiant « d’une compétence professionnelle adaptée » pourront pratiquer des interruptions volontaires de grossesse instrumentales en établissement de santé, dans les mêmes conditions que les médecins.

Complément du 26/04/2024 : Pascale Le Pors, vice-présidente du Syndicat national des gynécologues obstétriciens de France (Syngof), redoute des dérives et des risques pour la sécurité des soins. « Ce texte déroge à toutes les règles de sécurité de la chirurgie. Il est centré sur l’intérêt des sages-femmes et pas des patientes, dénonce-t-elle. Si une femme saigne à flot et qu’il n’y a pas d’anesthésiste à proximité, comment fait-on ? » (Source Le Quotidien du médecin, Arnaud Janin (24/04/2024))

 

[1] Le Parisien, Aurore Bergé : « Nous sommes en train de vivre notre MeToo, ça part vraiment de notre pays » (02/03/2024)

[2] France info, IVG : le gouvernement va réécrire le décret qui autorise les sages-femmes à pratiquer les interruptions volontaires de grossesse instrumentales (04/03/2024)

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