Pour la première fois en France des femmes ayant adopté des enfants « élèvent la voix pour s’inquiéter de la promotion croissante de la pratique des mères porteuses et des discours “candides” excluant toute voix dissonante » (cf. « Ceux qui utilisent le mot éthique comme complément de la GPA sont des menteurs, des ignorants ou des candides »).
Dans les médias, les témoignages de couples ayant eu recours à la gestation par autrui (GPA) se multiplient. Et Sabine Blanchard, une mère adoptante, constate avec onze autres mères que « des couples deviennent parents sans aucune interrogation sur le sort de ces femmes et le devenir des enfants ». « Le débat n’est pas permis », regrette-t-elle.
Ces femmes souhaitent alerter « sur les aberrations de la GPA » (cf. GPA : « On ne peut pas remplacer une souffrance d’adulte par une souffrance d’enfant »). Elles affirment leur légitimité : « en adoptant, nous avons été confrontées aux drames que vivent ces enfants, avec l’abandon comme point de départ. » « Ils ont des angoisses de séparation, une béance à l’origine de leur vie que nous essayons de combler », témoignent ces mères adoptantes. Elles rappellent que leurs enfants « ont la particularité d’avoir vécu dans leur chair une vie utérine et un abandon, très peu de temps après leur naissance. » « Nous pouvons chacune attester des ravages – et nous pesons nos mots – de cette séparation dramatique du nouveau-né de celle qui l’a porté et accouché », affirment-elles (Cf. GPA : une petite fille abandonnée par ses commanditaires en Ukraine).
Ainsi, ces mères témoignent qu’une fillette de sept ans « demande très souvent, au moment de son coucher, pourquoi ‘‘sa maman de naissance est partie’’, et pleure à chaudes larmes sur cet abandon qui a eu lieu à l’instant même où elle naissait ». Elles ajoutent : « Comment ces petits nés par GPA pourront mettre des mots sur leur naissance ? Seront-ils autorisés à dire une éventuelle souffrance quant à la séparation de celles qui les auront mis au monde ? »
Selon Marc Lasserre, le président du Mouvement pour l’adoption sans frontières, « aujourd’hui, on n’utilise pas tout ce que l’on a appris sur les adoptions pour réfléchir à l’avenir de ces enfants nés de mère porteuse ». « Dans trente ans, quel sera le récit familial de ces enfants ?, s’interroge-t-il. S’ils font une recherche sur leurs origines, à quoi auront-ils accès ? Il faut se placer du point de vue des enfants. Ne reproduisons pas les mêmes erreurs que celles qui ont pu être commises pour les adoptions dans les années 1970-1980. »
Source : Le Figaro, Agnès Leclair (05/11/2022) – Photo : iStock