Une femme de 57 ans a momentanément recouvré la vue. Aveugle depuis 16 ans à la suite d’une septicémie, un implant cérébral lui a permis de percevoir des motifs et de reconnaitre certaines lettres de l’alphabet (cf. Un implant pour « lire » des lettres quand on a perdu la vue).
Le dispositif est composé de 96 électrodes placées dans la région du cerveau responsable de la vision. Chaque électrode mesure 1,5 millimètre pour un diamètre de 80 microns, correspondant à « la taille des neurones avec lesquels nous souhaitons communiquer ». Il a été conçu par des scientifiques de l’Université Miguel Hernandez d’Elche (UMH) en Espagne. Des chercheurs de l’Université d’Alicante en Espagne, mais aussi de l’Institut de neuroscience des Pays-Bas et de l’Université de l’Utah aux États-Unis ont participé à cette étude « pionnière ». L’implantation a été réalisée pour la première fois chez cette personne aveugle, en 2018, pour une durée de six mois. Ce type de dispositif avait déjà été testé sur des personnes paralysées ou muettes (cf. Un implant cérébral pour permettre aux personnes paralysées de communiquer plus vite ; Un exosquelette commandé par des implants cérébraux pour permettre aux tétraplégiques de marcher ?). Mais, la nouveauté est que « les électrodes envoient non seulement des signaux électriques, mais elles collectent également la réponse neuronale qu’elles envoient à un système externe ». Le responsable du projet ajoute qu’« une rétine artificielle a parachevé le système ». Il conclut : « l’objectif était de transformer le stimulus optique en stimulus électrique, ce qui active le cerveau ».
Au fil des mois, « le cerveau de Madame Gómez s’entraînait, et, augmentant le nombre d’électrodes activées simultanément, la complexité de la stimulation a été renforcée ». Elle a finalement atteint 100% de réussite dans la détection des formes et des motifs. Le dernier mois, la patiente a lu certaines lettres avec un taux de 70% de réussite grâce à « l’activation simultanée de 16 électrodes ».
Plusieurs études ont été réalisées depuis les années 1970 pour tenter de rendre la vue à des personnes aveugles. Mais, la stimulation était, jusqu’à présent, toujours extérieure.
Selon le docteur Jaume Català, « une étape importante dans la vision artificielle avec stimulation corticale » a été franchie. Mais, l’ophtalmologiste des hôpitaux catalans Sant Joan de Déu et Bellvitge rappelle qu’ « il s’agit d’un cas individuel et d’une étude pilote ». Il faudrait par ailleurs augmenter le nombre d’électrodes, ce qui pose des problèmes de taille pour l’implantation dans le cerveau. De même, la patiente était « connectée à une unité centrale lors de sa participation aux tests ». Dès qu’elle était « débranchée », elle cessait de voir.
Le chercheur de l’UMH considère : « Nous avons besoin de davantage de données ». L’expérience a donc été étendue à d’autres volontaires. Mais, il avertit : « Nous cherchons des gens comme Bernadeta, qui était consciente qu’elle n’allait jamais revoir. Sinon, nous pourrions leur faire beaucoup de mal ».
Sources : Le Figaro, Lena (22/10/2021) ; El Pais, Miguel Angel Criado