Don d’organes : le protocole Maastricht III s’étend aux enfants

Publié le 26 Sep, 2023

Le rapport médical et scientifique de l’Agence de la biomédecine est paru. En matière de dons d’organes, le protocole Maastricht III est toujours à l’honneur, et va être étendu aux enfants.

En 2022, 5 495 organes ont été greffés, dont 536 à partir de donneurs vivants. Chez les donneurs décédés [1], le taux de prélèvement constaté au niveau national est de 24,8 donneurs par million d’habitants [2]. La hausse observée depuis 2021 est en partie due aux prélèvements de type Maastricht III qui ont vu une augmentation de 8,3% en un an (cf. Dons d’organes en France : l’opposition augmente, les prélèvements Maastricht III aussi). A l’échelon national, la part de ce type de prélèvement était de 13,9% en 2022 [3]. La hausse du nombre de prélèvements multi-organes se poursuit elle aussi.

Par ailleurs, en 2022, « 31 donneurs ont été prélevés d’au moins un organe sans qu’aucun organe n’ait au final été greffé », indique le rapport de l’ABM.

Un taux d’opposition tenace

C’est l’opposition au prélèvement qui explique près de 65% des arrêts de procédure de don d’organes. L’ABM déplore en outre un « déficit de donneurs » depuis 2019. Sur cette période, l’« activité » enregistre une baisse de plus de 15%.

« Ce déficit s’observe surtout pour les donneurs les plus âgés de 75 ans et plus (-39% en 3 ans), en lien avec la saturation des lits de soins critiques et des difficultés probables de prises en charge de la filière des patients neurolésés en coma grave et non en lien avec une modification des critères de sélection des greffons », note l’Agence. Elle souligne « des difficultés conjoncturelles d’admission en réanimation des patients présentant un AVC grave, hors ressources thérapeutiques, pouvant faire l’objet “d’un abord anticipé” », à savoir une « prise en charge d’un donneur potentiel uniquement dans un projet de prélèvement avant la survenue des signes de mort encéphalique ».

De nouveaux types de prélèvements

Suite à un arrêté du 5 juillet 2021, un programme de prélèvement sur donneurs séropositifs décédés en état de mort encéphalique a été mis en place l’année dernière. Ainsi, 3 personnes ont été prélevées, conduisant à 5 greffes rénales chez des receveurs également séropositifs pour le VIH. En outre, dans son avis du 30 décembre 2022, le Haut Conseil de Santé Publique a élargi la « possibilité sous condition » de prélever et de greffer des organes issus de donneurs positifs au Covid-19.

Par ailleurs, en 2022, 26 organes ont été « échangés entre la France et ses voisins européens »[4] : 21 greffons ont été exportés et 5 importés. En 2019, on en avait recensé 50. Ces échanges se font « essentiellement » avec Swiss Transplant, indique le rapport de l’ABM.

La promotion du protocole Maastricht III malgré une opposition record

En 2022, 235 prélèvements ont été effectués dans le cadre du protocole Maastricht III. L’augmentation de l’activité est liée à celle du nombre d’établissements hospitaliers autorisés. On en recensait 51 l’année dernière. « De nouveaux centres hospitaliers ont déposé ou sont en cours de rédaction du protocole local ce qui devrait permettre de poursuivre la croissance de cette activité dans les années à venir », se réjouit l’Agence.

Mais l’ABM indique un taux d’opposition record, et en forte augmentation [5] : 42%, quand celui observé pour les donneurs recensés en état de mort encéphalique est de 33%. Le protocole interrogerait-il ?

Dans 56,6% des cas, la cause des lésions cérébrales ayant conduit à une décision de « limitation ou d’arrêt des traitements » (LAT) est un « arrêt cardiaque récupéré ». Des personnes réanimées avant que le corps médical ne décide que c’est bien la fin.

En outre, l’année dernière, 3 patients n’ont pas été prélevés « pour problème d’arrêt circulatoire », la phase agonique ayant duré plus de trois heures.

Le protocole Maastricht III étendu aux donneurs de moins de 18 ans

En 2022, l’âge moyen des donneurs recensés dans le cadre du protocole Maastricht III était de 55 ans. L’âge maximal autorisé est passé à 65 ans en 2016, puis à 70 ans en 2019. La question se pose désormais pour les mineurs.

« Un groupe de travail spécifique sur le prélèvement pédiatrique a été mis en place dans le cadre du nouveau plan ministériel pour le prélèvement et la greffe d’organes et de tissus », indique le rapport de l’ABM. « Le comité de pilotage national qui s’est réuni en mars 2022, a validé les propositions des sociétés savantes de réanimation et d’anesthésie-réanimation pédiatriques pour l’extension du programme aux donneurs de moins de 18 ans dans des centres autorisés ». Cette « extension », déjà validée par le Comité Médical et Scientifique de l’Agence en janvier 2023, doit à présent l’être par le Conseil d’orientation avant sa mise en œuvre, prévue « courant 2023 ».

Seule restriction à ce protocole pédiatrique, une « condition de poids », « pour des raisons techniques inhérentes au recours à la CRN [6] ». N’y aurait-il que des considérations techniques ? (cf. Angleterre : les parents doivent avoir leur mot à dire concernant les soins de fin de vie de leur enfant) Depuis plusieurs années, le taux d’opposition connaît une « hausse significative » pour les prélèvements pédiatriques. .

 

[1] donneurs décédés en état de mort encéphalique (EME) ou ceux décédés après arrêt circulatoire

[2] Le taux de recensement est quant à lui de 43,7 donneurs recensés par million d’habitants en 2022. L’âge moyen des donneurs recensés est de 57,2 ans en 2022.

[3] contre 10% et 2020 et 13,5% en 2021

[4] Ces échanges se font dans le cadre du programme FOEDUS.

[5] Quatre ans auparavant il était de 29,7%.

[6] Circulation Régionale Normothermique

Photo : iStock

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