Des scientifiques chinois sont parvenus à cultiver des reins contenant des cellules humaines dans des embryons de porc. « Une première mondiale », affirment-ils. Leurs travaux ont été publiés dans la revue Cell Stem Cell [1].
L’objectif : la transplantation
« Des organes de rat ont été produits chez des souris et des organes de souris ont été produits chez des rats, mais les tentatives précédentes de produire des organes humains chez des porcs n’ont pas abouti », a déclaré Liangxue Lai, auteur principal de l’étude.
Les chercheurs de l’Institut de biomédecine et de santé de Guangzhou se sont concentrés sur les reins, car ce sont les premiers organes à se développer et les plus couramment transplantés en médecine humaine, indiquent-ils.
Des chimères porc-homme utilisant iPS et CRISPR
Leur approche vise à utiliser des porcs comme « incubateurs pour la croissance et la culture d’organes humains ». Le problème principal, techniquement parlant, est que « les cellules porcines l’emportent sur les cellules humaines » (cf. Projet de loi bioéthique : « Oui, les chimères ont raison d’effrayer »).
Les chercheurs ont utilisé l’outil d’édition génétique CRISPR « pour supprimer deux gènes essentiels à la formation des reins à l’intérieur d’un embryon de porc, créant ainsi ce que l’on appelle une “niche” ». Ensuite, ils ont ajouté des cellules souches pluripotentes humaines [2] « spécialement préparées », pour « remplir » la niche.
« 1 820 embryons dans 13 mères porteuses »
Avant d’implanter les embryons chimères chez les truies, ils les ont cultivés in vitro dans un milieu contenant « des substances qui nourrissent à la fois les cellules humaines et les cellules porcines ».
Au total, 1 820 embryons ont été implantés dans 13 « mères porteuses ». Les grossesses ont été interrompues à 25 et 28 jours « pour évaluer le fonctionnement de l’expérience ».
Des cellules humaines dans le cerveau des porcs
Cinq embryons ont été analysés. Leurs reins étaient « fonctionnellement normaux » étant donné leur stade de développement. Ils contenaient « entre 50 et 60 % de cellules humaines ». « Nous avons constaté que si l’on crée une niche dans l’embryon de porc, les cellules humaines se placent naturellement dans ces espaces », analyse Zhen Dai, coauteur de l’étude.
Mais des cellules humaines ont aussi été trouvées dans le cerveau des porcs. « Nous n’avons vu que très peu de cellules neurales humaines dans le cerveau et la moelle épinière, et aucune cellule humaine dans la crête génitale [3] », tente de rassurer le chercheur (cf. Des neurones humains implantés dans le cerveau de ratons).
De futurs travaux
L’équipe souhaite désormais « optimiser sa technologie pour l’utiliser dans les transplantations humaines ». « La proportion de cellules humaines dans les reins générés n’est pas encore assez élevée », pointe Darius Widera, professeur à l’université de Reading. En outre « une limitation importante est que les reins contenaient des cellules vasculaires dérivées de porcs, qui pourraient provoquer un rejet en cas de transplantation chez l’homme ».
Les chercheurs travaillent déjà à cultiver d’autres organes humains chez le porc, comme le cœur et le pancréas.
[1] Liangxue Lai & colleagues, Generation of a Humanized Mesonephros in Pigs from Induced Pluripotent Stem Cells via Embryo Complementation, Cell Stem Cell (2023). DOI: 10.1016/j.stem.2023.08.003
[2] Des cellules iPS
[3] Précurseur des organes sexuels
Source : Medical Xpress, Issam Ahmed (07/09/2023)