Des neurones humains implantés dans le cerveau de ratons

Publié le 13 Oct, 2022

Des chercheurs de l’Université de Stanford ont implanté des cellules nerveuses humaines dans des embryons de rats. Leurs travaux ont été publiés dans la revue Nature[1].

La greffe d’organoïdes de cerveau

L’équipe de Sergiu Pasca, professeur de psychiatrie et de sciences du comportement à la faculté de médecine de Stanford et auteur principal de l’étude, a utilisé des cellules souches humaines[2] pour fabriquer des organoïdes de cerveau[3] (cf. Des "mini-cerveaux" capables de se développer in vitro ?). Ils les ont ensuite implantés dans le cerveau de ratons[4], dans la zone responsable de la réception et du traitement des informations sensorielles comme le toucher, « afin que les cellules se développent et fonctionnent normalement ». Les cellules nerveuses humaines se sont en effet développées « de la même manière que chez l’homme », se connectant à celles du rat et « atteignant une taille six fois supérieure à celle qu’elles atteindraient en laboratoire ». Les organoïdes ont ainsi fini par occuper un tiers de l’hémisphère du cerveau du rat où ils avaient été implantés.

Lorsque les chercheurs ont ensuite « chatouillé » les moustaches des rats, « environ 70 % des cellules humaines placées dans le cerveau des créatures ont réagi à la sensation ». Les chercheurs sont également parvenus à « contrôler le comportement des rats », à l’aide de ces cellules humaines[5].

Vers le traitement de différents troubles ?

Cette étude porte sur une maladie génétique, appelée syndrome de Timothy, qui provoque une forme d’autisme et est liée à de graves problèmes cardiaques. Les scientifiques ont transplanté des organoïdes dans les deux côtés du cerveau d’un rat : l’un généré à partir des cellules d’une personne saine et l’autre à partir des cellules d’une personne atteinte du syndrome de Timothy.

Quelques mois après l’implantation, ils ont observé des différences entre les deux implants. Les chercheurs espèrent pouvoir ainsi tester des traitements[6], sans avoir à prélever des tissus du cerveau des patients (cf. Organoïdes : un modèle fidèle pour le cortex cérébral ?).

Une recherche controversée

Les chercheurs n’ont pas voulu implanter ces tissus humains dans le cerveau de primates. Leur cerveau ressemble davantage à celui des humains, expliquent-ils. Pour Sergiu Pasca, « l’utilisation de primates pour des recherches similaires serait “préoccupante” ».

Les rats ont un cerveau qui se développe environ 20 fois plus vite que le nôtre, explique le chercheur, « ce qui limite le degré d’intégration des cellules cérébrales humaines à celles des rats ». Il serait bien plus important avec le cerveau de primates.

Des experts ont toutefois réagi à cette recherche, craignant que les rats ne se mettent à penser ou à être dotés d’une conscience, comme des êtres humains (cf. Recherche sur les organoïdes de cerveau : une question de conscience).

 

[1] Sergiu Pașca, Maturation and circuit integration of transplanted human cortical organoids, Nature (2022). DOI: 10.1038/s41586-022-05277-wwww.nature.com/articles/s41586-022-05277-w

[2] Les cellules utilisées sont des cellules iPS, reprogrammées à partir des cellules de peau de trois patients souffrant du syndrome de Timothy ou de patients sains.

[3] Comportant « jusqu’à trois millions de cellules » humaines, les organoïdes ressemblent au cortex cérébral, la couche la plus externe du cerveau humain, qui joue un rôle clé dans des domaines tels que la mémoire, la pensée, l’apprentissage, le raisonnement et les émotions.

[4] Agés de deux ou trois jours, « un stade où les connexions cérébrales sont encore en formation ».

[5] Elles avaient été rendues photosensibles.

[6] Médicaments ou thérapies géniques, pour des troubles tels que l’autisme, la schizophrénie ou l’épilepsie

Sources : Phys.org, Laura Ungar (12/10/2022) ; Daily Mail, Victoria Allen (12/10/2022)

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