Des parents poursuivent l’hôpital qui ne leur a pas proposé de DPNI

Publié le 6 Juil, 2021

Le tribunal administratif de Caen vient de rejeter le recours de parents qui réclamaient « plus de 250.000 € » au centre hospitalier d’Avranches-Granville pour ne pas avoir détecté la trisomie 21 de leur fils[1]. Les parents ont décidé de faire appel.

Après la naissance de leur fils en décembre 2017, le couple avait réclamé des indemnités à l’hôpital. Devant le refus de l’établissement, il avait saisi le juge des référés l’année suivante. Selon les juges, l’hôpital a commis une « faute » qui a conduit à « une perte de chance de dépistage de la trisomie 21 de leur enfant qu’il convient d’évaluer à 70 % ». Un taux qui correspond à la « fiabilité » du test des marqueurs sériques maternels, le premier « filtre », avec la mesure de la clarté nucale, destiné à repérer les enfants trisomiques. Le couple reproche à l’hôpital une mauvaise évaluation du « facteur de risque » estimé par ce dépistage combiné. Une évaluation qui a conduit l’hôpital à ne pas prescrire de dépistage prénatal non invasif (DPNI) « réputé fiable à 99% ». Un deuxième filtre auquel aurait voulu se soumettre le couple (cf. Dépistage prénatal non-invasif : un consentement réel des femmes ?).

Mais les juges ont refusé de condamner l’hôpital au motif que les parents « ne soutiennent aucunement que la perte de chance de faire réaliser un test ADN[2] […] leur a fait perdre une chance de recourir à une interruption volontaire […] » de grossesse. Un manquement qui n’a donc « aucun lien causal direct avec les préjudices ayant pu résulter, pour eux, de la naissance de leur enfant handicapé », estime le tribunal. Cependant Me Vincent Levaufre-Houis, l’avocat du couple qui va interjeter appel, objecte que « le tribunal n’a pas eu connaissance d’une attestation des parents “indiquant qu’ils auraient pratiqué une IVG si le test avait été réalisé dans des conditions normales et fait apparaître un risque élevé de trisomie 21 ».

Ainsi, dans cette affaire, les parents regrettent qu’on ne leur ait pas proposé d’effectuer un dépistage prénatal non invasif qui, lui, n’aurait pas raté sa « cible » (cf. Jean-Marie Le Méné : “Le DPNI est un dispositif qui a l’obsession de l’exhaustivité et la hantise de rater la cible”). Sa cible, c’est-à-dire un petit garçon âgé de maintenant de trois ans et demi.

Au-delà de cet aspect moral, se profile une compétition prosaïque entre le dépistage combiné (marqueurs sériques + clarté nucale) et le DPNI dont il est clair que le second sortira vainqueur pour le plus grand profit des laboratoires (cf. DPNI : Bataille juridique et financière autour d’un brevet) et le raffinement de l’eugénisme qui touche les enfants porteurs d’une trisomie 21.

[1] PressPepper, Samuel Hauraix (02/07/2021)

[2] Le DPNI consiste à analyser le génome du fœtus à partir de son ADN circulant dans le sang maternel

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