Accès à l’IVG : la Commission des affaires sociales du Sénat auditionne le Planning familial

Publié le 4 Avr, 2024

Le 27 mars, la Commission des affaires sociales du Sénat a auditionné Sarah Durocher, présidente de la Confédération nationale du Planning familial, et Albane Gaillot, chargée de plaidoyer et ancienne députée (cf. Jean-Marie Le Méné : “au fond de la loi Gaillot, il y a des motifs d’espérance”). Cette audition s’inscrit dans le cadre d’une mission d’information sur l’accès à l’interruption volontaire de grossesse, « afin de dresser un état des lieux objectif des difficultés rencontrées, sur le territoire, par les femmes souhaitant y recourir ». Elle devrait rendre ses conclusions au printemps 2024.

« Eduquer » à la sexualité

« L’avortement concerne une femme sur trois », des femmes de tous âges, de toutes les classes sociales, indique Sarah Durocher. Un chiffre impressionnant, mais qui ne semble pas suffire (cf. France : 234 300 avortements en 2022). Pour la présidente du Planning familial, il existe deux « obstacles » principaux en termes d’accès à l’IVG : l’information et la fermeture de centres IVG. Sur le premier point elle regrette l’existence de sites internet « anti-choix », « anti-droits » bénéficiant d’un bon référencement (cf. Le délit d’entrave à l’IVG fait son retour dans le projet de loi « séparatisme »). Les femmes ayant souffert d’avoir avorté sont priées de se taire (cf. IVG : une femme témoigne « ce n’était pas “mon choix”, mais “ma peur” »).

Anne-Sophie Romagny, sénatrice de la Marne (Union centriste), veut souligner l’augmentation du nombre d’IVG réalisées récemment, « à son plus haut niveau depuis 1990 ». Il s’agit peut-être d’une question de territorialité avance l’élue, car « quand on regarde juste la statistiques, l’accès à l’IVG ne semble pas si compromis que ça », note-t-elle.

Pour Sarah Durocher, il n’y a pas de sujet. « Ça augmente un peu, ça diminue un peu, pour nous c’est pas alarmant », considère la présidente de la  Confédération nationale du Planning familial qui résume : « Ce n’est pas le problème l’avortement, le problème c’est la grossesse non désirée. L’avortement c’est une solution à une grossesse qui n’est pas choisie, qui n’est pas voulue, qui n’est pas programmée ».

Le mantra de la contraception

Albane Gaillot évoque le refus de « certains médecins » de pratiquer des IVG. La suppression de la clause de conscience spécifique est la seule disposition de sa proposition de loi à ne pas avoir été votée (cf. La clause de conscience : seule rescapée de la « loi Gaillot »). « L’avortement en France est encore un acte à part », déplore-t-elle.

« 72% des femmes qui avortent ont un contraceptif », précise Sarah Durocher. « Ce ne sont pas que des jeunes qui sont complètement écervelées, qui ne savent pas ». « Les grossesses non désirées, ça passe par une meilleure éducation, ça passe par une meilleure information sur la contraception », affirme la présidente du Planning familial sans que le paradoxe ne semble l’interroger.

Elle déplore, sur ce sujet aussi, la présence des « anti-choix » « anti-droits » parmi les associations de parents opposés à une « éducation complète à la sexualité » (cf. « Education à la sexualité » : plaquer sur les enfants et les adolescents des préoccupations d’adultes). Ce sujet relèverait-il de l’école ? Les établissements scolaires devraient-ils promouvoir la contraception ? Ne faudrait-il pas plutôt envisager autrement la sexualité, et cesser de présenter la grossesse sous le seul angle du « risque » ?

Suite à une question de la sénatrice LR de Charente-Maritime, Corinne Imbert, sur l’augmentation du recours à la pilule du lendemain (cf. « Contraception d’urgence » : quelle information des femmes ?), Sarah Durocher estime qu’il existe une désinformation en matière de contraception : « les hormones c’est pas bon pour le corps ». « Désinformation » ou « information peu sourcée » ? Les études quant au risque de l’utilisation de contraceptifs abondent pourtant, y compris, très récemment, et émanant de l’ANSM (cf. Contraception : des progestatifs courants augmentent le risque de tumeur cérébrale).

IVG et pauvreté : une vraie question, pas de réponse

Anne-Sophie Romagny souligne le recours à l’avortement bien plus fréquent chez les femmes pauvres. « Pensez-vous que ces chiffres s’expliquent par des difficultés d’accès à la contraception ou des difficultés pour ces femmes d’assurer financièrement la venue d’un enfant ? », interroge-t-elle.

Sarah Durocher affirme avoir été « peu étonnée » par ces données. Les femmes précaires sont « les plus éloignées du droit, de l’information », justifie-t-elle. Pourtant, ces femmes ont bel et bien exercé leur « droit » d’avorter. La question n’est-elle pas ailleurs ? Qu’elles aient voulu accueillir cet enfant, mais qu’elles n’en aient pas eu les moyens, ne semble pas une hypothèse qui mérite d’être examinée.

« Les femmes ne parlent pas de l’avortement », regrette la présidente du Planning familial. Peut-être parce que c’est trop difficile ? Trop douloureux ? Cette hypothèse ne sera pas évoquée non plus.

Pourtant, « on sait très bien que l’avortement c’est traumatisant pour les femmes », rappelle le sénateur de la Corrèze Daniel Chasseing (groupe Les Indépendants – République et Territoires). Il ne sera pas contredit. Il est des vérités qui finissent par s’imposer.

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