Un nouveau sondage mené par l’IFOP pour l’Association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD) vient de paraitre. Pour l’association la conclusion serait sans appel : les Français seraient très largement favorables à l’euthanasie, à 92 %, comme au suicide assisté, à 89 %.
Les choses sont elles aussi claires ? La réponse pourrait bien être dans la question. En effet, les sondés se sont vu poser deux questions, une relative à l’euthanasie, l’autre au suicide assisté. Toutefois elles n’étaient pas : « êtes-vous favorable à l’euthanasie ? », « êtes-vous favorable au suicide assisté ? ».
Des questions orientées
« Certaines personnes souffrant de maladies insupportables et incurables demandent parfois aux médecins une euthanasie, c’est-à-dire qu’on mette fin à leur vie, sans souffrance. Selon vous, la loi française devrait-elle autoriser les médecins à mettre fin, sans souffrance, à la vie des personnes atteintes de maladies insupportables et incurables si elles le demandent ? » est ce qu’on a demandé aux personnes interrogées avant de conclure sur leur position vis-à-vis de l’euthanasie.
« Souffrant, souffrance, insupportable » : l’ADMD, après avoir affirmé que les demandes d’euthanasie existent « parfois », met ainsi le sondé devant une alternative : souffrir de souffrances insupportables ou « mettre fin à la vie » sans souffrances (cf. Euthanasie : une mort douce ?)[1]. L’hyperbole face à l’euphémisme.
Mettre la pression
Les sondés se seraient-ils déclarés dans les mêmes propositions favorables à l’euthanasie et au suicide assisté si on avait pris le temps de leur expliquer ce qu’offrent les soins palliatifs ? Si on leur avait proposé l’accompagnement et la prise en charge de la douleur comme une possibilité ? Cela a déjà été fait, et a montré que, dans ce cadre, seules 24% des personnes interrogées étaient favorables à la légalisation de l’euthanasie (cf. Euthanasie : « ne pas se laisser enfermer dans le piège du choix truqué entre mourir ou souffrir »).
Cette enquête, opportunément publiée alors que la commission spéciale chargée du projet de loi sur la fin de vie examine cette semaine les amendements déposés par ses membres (cf. Fin de vie : l’examen des amendements débute, les débats sont lancés), ne tente-t-elle pas de faire pression sur les députés ? (cf. Fin de vie : les sondages « ne procurent jamais une vérité de l’opinion »)
[1] Pour le suicide assisté la question suivante a été posée : « Vous personnellement, approuveriez-vous l’autorisation pour les personnes souffrant de maladies insupportables et incurables de recourir à un suicide assisté, c’est-à-dire au fait que ces personnes prennent un produit létal (mortel), en présence d’un médecin, pour mettre fin à leurs souffrances ? »