« Mon Espace Santé » s’ouvre au secteur privé

Publié le 24 Mar, 2022

Vendredi 18 mars, l’Agence du numérique en santé (ANS) tenait une conférence de presse afin de présenter le « catalogue de service » de « Mon Espace Santé » (cf. « Mon espace santé » : le lancement du dossier médical numérique sous consentement présumé). A partir du 31 mars, « tous les éditeurs du secteur pourront déposer leur demande de référencement au catalogue de service » de cet espace numérique dédié au stockage des données de santé de chaque Français [1]. « Plus de 130 éditeurs » ont commencé à le préparer.

Les échanges de données rendus possibles

Ce catalogue est destiné à « présenter la richesse de l’offre de services numériques utiles pour prendre soin de sa santé », explique l’ANS. « La loi prévoit que les usagers puissent autoriser des échanges de données avec les services référencés qui font de la prévention, du diagnostic, du soin ou du suivi social ou médico-social », précise l’Agence.

Des données qui peuvent être très diverses. En effet, « Mon Espace Santé, comme carnet de santé numérique, permettra de centraliser et de sécuriser les données collectées par une balance ou une montre connectée ». Les échanges de données seront autorisés « progressivement », « d’ici la fin de l’année ».

Un but lucratif ?

Parmi les 30 éditeurs de services numériques en santé qui ont activement participé à la construction de ce catalogue on trouve Elsan [2], Withings (cf. Santé connectée : l’entreprise Withings lève 53 millions d’euros), Doctolib (cf. Données de santé : Doctolib à la conquête d’un nouveau marché ; Doctolib : vol de données personnelles sur plus de 6000 rendez-vous), les Hospices civils de Lyon, Abbott [3] ou encore la Poste.

Le catalogue leur permettra « d’être visibles auprès de tous les Français et donc de générer l’acquisition de nouveaux clients », a déclaré l’ANS le 18 mars. En cas d’échanges de données, ces éditeurs « devront indiquer les données utilisées ainsi que la finalité et la valeur ajoutée pour l’usager ».

Des données de santé qui s’ignorent ?

Mais il existe différents types de données de santé. Certaines, comme par exemple les maladies ou antécédents médicaux sont des données de santé « par nature », ainsi que le considère la CNIL. D’autres données, apparemment anodines de prime abord, peuvent toutefois relever des données de santé : « les données de santé “par croisement ». Ainsi par exemple « d’un nombre de pas combiné à une mesure de poids, ou à un apport calorique ».

Le RGPD [4] définit les données de santé comme les informations personnelles ayant trait à la « santé physique ou mentale d’une personne physique, y compris la prestation de services de soins de santé, qui révèlent des informations sur l’état de santé de cette personne ».

Des professionnels inquiets

Pour la Coordination Nationale des comités de défense des hôpitaux et maternités de proximité (CDHMP), avec le lancement de « Mon Espace Santé », le ministère de la Santé « rompt » avec le principe du consentement libre et éclairé.

« Si le maître d’œuvre de “Mon Espace Santé“, est la Caisse Nationale d’Assurance Maladie, ce sont des entreprises privées qui ont été choisies pour emporter le développement technique », déplore la CDHMP. Avec des « risques considérables d’un détournement des données à des fins commerciales ».

« La volonté politique est bien de poursuivre une logique de privatisation de notre système de santé, en confiant le numérique en santé aux multinationales privées, c’est-à-dire aux lois du marché », jugent-ils.

 

[1] « Pour être référencés dans le catalogue, les services numériques candidats devront respecter les exigences de sécurité, d’interopérabilité et d’éthique de la doctrine du numérique en santé »

[2] Entreprise qui commercialise un « assistant digital »

[3] « Leader mondial dans la surveillance du diabète », il commercialise un dispostif : FreeStyle Libre, composé d’un capteur de mesure en continu du glucose et d’une application mobile FreeStyle LibreLink.

[4] Règlement Général sur la Protection des Données

Sources : Agence du numérique en santé (18/03/2022) ; Hospimedia, Géraldine Tribault (22/03/2022) ; Coordination Nationale des CDHMP, CP (18/03/2022) ; DSIH, Alexandra Iteanu (23/03/2022) – Photo : iStock

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