En Hongrie, « la contraception forcée est la règle » pour les personnes handicapées selon les mots de Sandor Gurbai, avocat et porte-parole de la Fondation Validity (cf. Australie : stérilisations, avortements et contraception forcés pour des femmes handicapées ?). « Il est étrange que dans des institutions où vivent 200 ou 300 personnes handicapées, il n’y ait aucune grossesse » poursuit-il (cf. CEDH : L’avortement et la contraception forcés sont des traitements inhumains).
La contraception forcée
En effet, dans l’établissement résidentiel pour personnes handicapées de Tordas, une ville à 1h de la capitale hongroise, « au cours des 20 dernières années, il n’y a eu ni naissance ni avortement » note Melinda Bartok, la responsable des infirmières. Pourtant cette institution accueille 200 résidents dont environ 50 couples comme Tibor et Piroska. Parmi les femmes, seulement cinq d’entre elles prennent des contraceptifs ce qui était le cas de Piroska, âgée aujourd’hui de 58 ans.
« Je prenais de l’Ovral, des pilules roses et des pilules blanches » explique-t-elle tout en ajoutant que sur prescription du neurologue et sans son accord, elle recevait aussi des injections.
Melinda Bartok explique le protocole mis en place « chaque fois qu’un garçon et une fille s’approchent l’un de l’autre ». Avec l’accord des parents, qui peut se réduire à « un signe de tête », la personne handicapée est soumise à un examen gynécologique avant de se voir prescrire des contraceptifs.
Le recours à la stérilisation
Mais, quand la contraception ne convient pas aux patients, les institutions ont recours à la stérilisation (cf. La stérilisation, premier “contraceptif” au monde). Au total, 15 femmes ont subi une ligature des trompes à Tordas. Cette pratique n’est pas criminalisée en Hongrie comme au Portugal et en République Tchèque. Pour y avoir recours le juge doit écouter la patiente et ses tuteurs, ou seulement ces derniers si le handicap empêche la femme de s’exprimer oralement. En revanche le texte ne précise pas la manière d’écouter de telle sorte que, dans certains cas, « si la personne handicapée reste assise sans rien dire, son consentement est considéré comme acquis » explique Sandor Gurbai.
De plus, lorsque la grossesse présente un risque pour la femme handicapée, alors le juge peut ordonner la stérilisation forcée sans obtenir son accord. Pour cela, le système judiciaire prend en considération un certain nombre de facteurs notamment « le fait qu’une personne soit considérée comme incapable d’élever un enfant ». La possibilité que l’enfant d’une personne « dépourvue de capacité » soit « gravement handicapé » peut être une cause de stérilisation forcée.
Ce sont donc les juges qui « analysent si la personne serait capable d’élever l’enfant et si son enfant serait handicapé, et ils décident en leur nom, ce qui est évidemment très préjudiciable » reproche Catherine Naughton est la directrice du Forum européen des personnes handicapées.
« La question de savoir si les personnes handicapées devraient avoir une famille n’est même pas posée, car elles sont traitées comme des enfants » déclare l’avocat hongrois Tasz Kristof Kornyei.
Source : Euronews, Laura Llach et Lucía Riera (09/06/2023)