Après avoir été adoptée par l’Assemblée nationale (cf. Fausses couches : la proposition de loi votée à l’unanimité), la proposition de loi visant à favoriser l’accompagnement des couples confrontés à une fausse couche a été votée à l’unanimité par le Sénat ce jeudi après-midi.
Le champ de compétence limité des sages femmes ?
Au cours de la discussion en séance publique, de nombreux amendements ont été discutés. Mais plusieurs ont reçu un avis défavorable de la Commission et du gouvernement représenté par Isabelle Rome, ministre de l’Egalité entre les femmes et les hommes, de la Diversité et de l’Egalité des chances. Il s’agit notamment de trois amendements similaires ayant pour objectif de favoriser une prise en charge globale de l’interruption spontanée de grossesse par les sages-femmes. « Les sages-femmes ne doivent pas être limitées à un rôle de prescription de l’accompagnement psychologique » explique Laurence Cohen (groupe Communiste, Républicain, Citoyen et Ecologiste), qui a présenté l’un des amendements. Etant donné que la sage-femme peut prescrire la pilule abortive dans le cadre d’une IVG médicamenteuse, pourquoi ne pourrait-elle pas administrer ces mêmes substances à la patiente confrontée à une fausse couche ? Une comparaison réitérée par Emilienne Poumirol (groupe Socialiste, Écologiste et Républicain).
Mais les interruptions spontanées de grossesse trouvant souvent leur origine dans une anomalie embryonnaire ou dans un problème de santé de la mère, le diagnostic médical peut s’avérer nécessaire. Ce qui dépasse le champ de compétence des sages-femmes, estiment la Commission et le gouvernement. Une décision que regrette Laurence Cohen qui rappelle que « la profession de sage-femme n’est pas paramédicale mais médicale ».
Une information « essentielle » mais suffisante ?
Alors qu’une grossesse sur quatre se solde par une fausse couche et qu’une femme sur dix traverse une fausse couche dans sa vie, « l’information est quelque chose d’essentiel » souligne Emilienne Poumirol (cf. Fausses couches : accompagner psychologiquement la perte d’un enfant). Mais le gouvernement l’estime suffisante, faisant référence aux renseignements donnés sur le compte Ameli. La Commission évoque quant à elle la diversité des situations et la nécessité de s’y adapter. Le médecin devrait donc être libre de mentionner ou non les risques d’une fausse couche.
Les amendements sur le sujet ont également été rejetés.
Le congé spécifique rejeté
Laurence Cohen propose un congé spécifique. Une mesure qu’elle juge nécessaire en raison de l’impact d’une fausse couche sur la santé mentale. Un mois après une interruption spontanée de grossesse, 24% des femmes souffrent d’anxiété modérée à sévère et 11% de dépression, indique-t-elle (cf. Fausses-couches : reconnaître la douleur de la perte d’un enfant non né). Raymonde Poncet Monge (groupe Ecologiste – Solidarité et Territoires) présente l’amendement de Mélanie Vogel allant également dans ce sens. Selon elle, il faudrait prévoir un congé spécifique de 3 jours. Mais la Commission, soutenue par le gouvernement, émet un avis défavorable car « l’employeur n’a pas à connaître le motif pour lequel la femme est arrêtée ». Un régime d’indemnisation spécifique et totale de cet arrêt de travail est déjà prévu, argumente-t-il. Cette opposition est inexplicable pour Laurence Cohen qui souligne leurs efforts pour que la fausse couche ne soit plus un sujet tabou.
Un amendement présenté par la Commission et visant à créer une protection contre le licenciement d’une durée de 10 semaines pour les salariées confrontées à une fausse couche tardive, entre la 14ème et la 21ème semaine d’aménorrhée incluse, est quant à lui adopté.
Voté par 339 voix, sur un total de 343 sénateurs, le texte aura fait l’unanimité des deux chambres.