Le mythe de la gratuité du don de sperme est en train de voler en éclats. Pour faire face à la pénurie de gamètes, les pays qui ont généralisé la PMA indemnisent les donneurs.
Les CECOS[1] recueillent les dons de sperme et d’ovocytes. Avec l’adoption en août dernier de la loi de bioéthique, chargés de permettre « à des couples et des femmes non mariées » de réaliser une « procréation par don », ils doivent faire face à un afflux de nouvelles demandes. Responsable du centre de l’hôpital Cochin à Paris, Catherine Patrat explique que « le nombre de demandes de spermatozoïdes a été multiplié par cinq ou six »[2]. Les CECOS prévoient une augmentation de 3500 demandes sur l’année 2021. Dans le même temps, la levée de l’anonymat des donneurs, elle aussi introduite dans la loi d’août, pourrait en refroidir plus d’un…
Une campagne pour inciter au don de sperme et d’ovocytes
Si Emmanuelle Cortot-Boucher, directrice de l’Agence de la biomédecine, estime que les stocks sont « suffisants pour faire face aux besoins pour les prochaines années même si la demande des femmes seules et des femmes mariées est dynamique », l’Agence lance une nouvelle campagne pour inciter au don de gamètes : sperme et ovocytes (cf. PMA : l’ABM en campagne). Campagne d’une ampleur inédite, tournée vers le grand public, « Merci » surfe sur les bons sentiments.
Il n’est pas certain que la campagne ait un réel impact et suscite de nouveaux candidats au don. D’abord parce qu’un don de gamètes : sperme ou ovocytes, transmet avant tout une hérédité, un patrimoine génétique et entraine, inconsciemment probablement, une responsabilité à laquelle il est, malgré tout, difficile d’échapper.
De donneur à vendeur de gamètes
Aude Mirkovic, juriste, maître de conférences en droit privé, explique que « les pays qui ont généralisé la procréation technologique », l’ouvrant à des personnes qui ne souffrent pas d’infertilité, « ont fini par rémunérer l’apport de gamètes, passant du don à la vente de sperme et d’ovocytes »[3]. C’est le cas de la Belgique et du Canada. Si ces deux pays ont maintenu la gratuité, 90% des besoins en sperme de la Belgique proviennent du Danemark. Au Canada, ce sont des Etats-Unis que 90% des besoins en sperme sont acheminés. Au Danemark, les donneurs sont « indemnisés ». Aux Etats-Unis, les donneurs de sperme peuvent recevoir une « compensation » qui peut aller jusqu’à 1500$/mois [4] pour un « job » où ils sont « leur propre parton » – be your own boss[5] – et qui les occupe, une fois qualifiés, « moins de 5 heures par mois ». Pour la juriste, « la production technologique de l’humain est un vaste marché, qui fait des individus à la fois la matière première et les consommateurs de ce business ».
Cet article de la rédaction Gènéthique a été initialement publié sur Aleteia sous le titre : PMA pour toutes : comment faire face à la demande de sperme ?
[1] Centre d’étude et de conservation des œufs et du sperme
[2] JIM, La France a besoin de votre sperme (22/10/2021)
[3] Forte hausse des demandes de PMA : avis de tempête sur les dons de gamètes ? Atlantico.fr (24/10/2021)
[4] California Cryobank Sperm Donor Compensation (spermbank.com)
[5] Be your own boss! – California Cryobank Sperm Donor Compensation (spermbank.com)
Photo : iStock