Une étude, dirigée par l’université du Michigan et fondée sur l’examen des données génétiques et sanitaires de plus de 276 000 personnes, indique que « les mutations génétiques qui favorisent la reproduction ont tendance à raccourcir la durée de vie »[1]. Elle a été publiée dans la revue Science Advances [2].
En analysant les données de 276 406 personnes enregistrées dans la UK Biobank [3] (cf. Données de santé : la UK Biobank partage ses données avec des assureurs), ils ont constaté que reproduction et durée de vie sont fortement corrélées génétiquement, mais négativement. Ainsi, selon l’étude, les individus porteurs de mutations qui les « prédisposent à des taux de reproduction relativement élevés » ont moins de chances de vivre jusqu’à l’âge de 76 ans que ceux porteurs de mutations qui les prédisposent à des taux de reproduction « relativement faibles ».
Deux catégories de facteurs
Les auteurs rappellent toutefois que la reproduction et la durée de vie sont certes influencées par des facteurs génétiques, mais également environnementaux. Par rapport aux facteurs environnementaux – « notamment l’impact de la contraception et de l’avortement sur la reproduction et des progrès de la médecine sur la durée de vie » – les facteurs génétiques examinés dans l’étude jouent un rôle « relativement mineur », indiquent les scientifiques.
Tenir les équilibres
En génétique, le concept de pléiotropie postule qu’une seule mutation peut influencer plusieurs traits. L’idée qu’une même mutation peut être à la fois bénéfique et néfaste est connue sous le nom de « pléiotropie antagoniste ».
Ainsi, « on connaît depuis longtemps le gène de la résistance au sida puisqu’il existe chez un peu moins de 1% de la population, indique le biologiste Jacques Testart. Mais on sait aussi que ce gène favorise la grippe » (cf. Préserver la diversité humaine pour faire face aux épidémies ?). De son côté Didier Lacombe, directeur du service de génétique médicale du CHU de Bordeaux, rappelle qu’« en Afrique centrale, 30 à 50 % de la population est atteinte de la drépanocytose, une maladie des globules rouges. Pourquoi ? Tout simplement parce que cela correspond aux personnes protégées contre le paludisme ».
A l’heure où les chercheurs développent des outils d’édition du génome (cf. CRISPR or not CRISPR ? La FDA approuve deux thérapies géniques pour la drépanocytose), les exemples se multiplient pour appeler à la prudence.
[1] Phys.org, University of Michigan, Genetic mutations that promote reproduction tend to shorten human lifespan, study shows (08/12/2023)
[2] Erping Long et al, Evidence for the role of selection for reproductively advantageous alleles in human aging, Science Advances (2023). DOI: 10.1126/sciadv.adh4990
[3] Les chercheurs ont examiné la fréquence de 583 variants génétiques associées à la reproduction dans la base de données
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