Dans un rapport intermédiaire de la première étude menée chez l’homme présentée lors des sessions scientifiques 2023 de l’Association américaine de cardiologie, la société Verve Therapeutics a annoncé les résultats préliminaires de son essai de thérapie génique visant à traiter les personnes souffrant d’une forme héréditaire d’hypercholestérolémie (cf. CRISPR : un essai clinique contre l’hypercholestérolémie ; Essai CRISPR : la FDA s’interroge sur de possibles transmissions à la descendance).
Des résultats plutôt positifs
Avec une seule injection, la thérapie qui met en œuvre l’édition de base a permis de réduire, « de manière significative », le « mauvais cholestérol »[1] chez les personnes porteuses du gène PCSK9, qui induit un « risque élevé » de crise cardiaque « précoce ».
L’étude en cours a porté sur 7 hommes et 2 femmes de Nouvelle-Zélande ou du Royaume-Uni. Les patients sont âgés en moyenne de 54 ans. Malgré la prise d’un traitement, ils présentaient des niveaux « extrêmement élevés » de mauvais cholestérol [2]. La majorité des participants de l’étude souffraient d’une maladie coronarienne sévère préexistante et avaient déjà subi une crise cardiaque, un pontage coronarien ou la pose d’une endoprothèse pour permettre un flux sanguin adéquat vers le muscle cardiaque. Aucun d’entre eux ne prenait d’inhibiteurs de PCSK9 pendant la durée de l’étude.
Le traitement a permis de réduire le taux de cholestérol chez les participants qui ont reçu les doses de traitement les plus élevées, entre 39 % et 55 %[3]. « Nous avons été ravis de constater que les tests précédents que nous avions effectués sur VERVE-101 dans des modèles animaux se traduisaient fidèlement par ces résultats chez l’homme », a déclaré le Dr Andrew M. Bellinger, directeur scientifique chez Verve Therapeutics.
Des inquiétudes demeurent
A ce stade, la plupart des événements indésirables survenus au cours de l’étude étaient « bénins et sans rapport avec le traitement », affirme l’entreprise. Des « événements cardiovasculaires graves » sont survenus chez deux patients qui souffraient d’une maladie coronarienne sous-jacente à un stade avancé. L’un de ces deux patients est décédé d’une crise cardiaque cinq semaines après avoir reçu le traitement VERVE-101, le second a été victime d’une crise cardiaque le lendemain. Aucune modification du protocole n’a été recommandée.
L’entreprise doit également suivre les participants à l’essai pendant 14 ans, comme l’exige la FDA pour les thérapies d’édition de gènes. « Il s’agit d’une étude d’édition de gènes – vous modifiez le génome pour toujours », rappelle Karol Watson, cardiologue à l’université de Californie. « La sécurité sera de la plus haute importance, d’autant plus qu’il existe actuellement des stratégies sûres et efficaces pour réduire les taux de lipides. »
Complément du 04/04/2024 : Mardi, Verve Therapeutics a annoncé interrompre son essai clinique Heart-1 en raison d’effets secondaires apparus chez un nouveau patient. Celui-ci a développé des « enzymes hépatiques anormales » ainsi qu’une thrombocytopénie, un trouble causé par une baisse du nombre de plaquettes dans le sang. Cette affection grave peut, dans le pire des cas, entraîner une hémorragie interne mortelle.
Les chercheurs pensent qu’il s’agit d’un problème lié à la méthode d’administration de la thérapie, plutôt qu’au processus d’édition génétique lui-même. L’entreprise a choisi de se concentrer désormais sur une nouvelle version de la thérapie, VERVE-102, en suspension dans un sérum lipidique différent. Un nouvel essai, baptisé Heart-2, devrait débuter au cours du deuxième trimestre de cette année. Verve a reçu l’autorisation des régulateurs européen et canadien pour démarrer ce nouvel essai clinique.
[1] LDL
[2] mesure moyenne de 201 mg/dL
[3] Chaque participant a reçu une seule perfusion intraveineuse de VERVE-101, la première cohorte (n=3) recevant une faible dose de 0,1 mg/kg et les autres cohortes recevant des doses croissantes, « après consultation d’un comité indépendant de surveillance de la sécurité ». La dose la plus élevée a été de 0,6 mg/kg. Le taux de LDL a été réduit de 39 % et 48 % chez les deux participants ayant reçu 0,45 mg/kg de médicament et de 55 % chez le seul participant ayant reçu 0,6 mg/kg. Une réduction du LDL à six mois a été obtenue chez le seul participant ayant reçu la dose de 0,6 mg/kg, avec un suivi continu.
Sources : AP news (12/11/2023) ; Nature, Miryam Naddaf (13/11/2023) ; Futurism, Maggie Harrison Dupré (03/04/2024) ; Stat, Matthew Herper (02/04/2024) – Photo : iStock