ABE : un « éditeur de base » qui vient compléter l’outil CRISPR

Publié le 25 Oct, 2017

Le professeur David Liu de Harvard et ses collègues décrivent dans la revue Nature leur dernière découverte : une « ‘machine moléculaire’ qui permet de réécrire le génome à la lettre près » et permettrait ainsi de traiter de nombreuses maladies génétiques : celles dues à une mutation ponctuelle dans l’ADN, par exemple certaines formes de cécité, de surdité et de maladies sanguines.

Baptisé « ABE » et décrit comme un « éditeur de base[1] », cette « chirurgie chimique de précision » vient compléter l’outil CRISPR Cas9 utilisé depuis quelques années : « Si CRISPR-Cas9 peut être considéré comme des ciseaux moléculaires, les éditeurs de bases sont des crayons », explique David Liu. Ainsi ABE ne vient pas remplacer CRISPR Cas9 : « Si pour certaines applications, les ciseaux sont le meilleur outil, pour d’autres, comme le fait de changer une seule base, le crayon est meilleur ». Il s’agit d’une « munition » de plus pour « l’artillerie de l’édition du génome », commente le docteur Helen O’Neill de l’University College London.

« En pratique, les chercheurs ont introduit dans les cellules les instructions, portées par du matériel génétique, afin qu’elles construisent elles-mêmes ce nouvel éditeur de base pour réparer leurs propres mutations, en l’occurrence pour convertir dans leur génome une paire de lettre A-T en G-C ». Ils ont testé ce système sur des cellules d’un malade atteint d’hémochromatose[2], ainsi que pour tester un traitement de pathologies sanguines comme la drépanocytose. « La technique est pour le moment limitée, on ne peut pas modifier ce que l’on veut, où l’on veut sur l’ADN. Mais il y a un fort potentiel », constate Jean-Louis Mandel, généticien et chercheur au CNRS. L’enzyme ABE est « à première vue beaucoup plus précis » que CRISPR pour corriger une mutation ponctuelle ; le taux de réussite est beaucoup plus important, et « les effets secondaires sont quasiment indétectables ». Toutefois « cette technique ne serait pas possible sans l’invention CRISPR Cas9 », qui lui permet de cibler la bonne partie de l’ADN.

« Une énorme quantité de travail est encore nécessaire avant que ces machines moléculaires puissent être utilisées pour traiter des patients ». Il faut notamment « trouver un moyen de transport pour emmener l’enzyme jusqu’à l’intérieur de la cellule » d’un organisme vivant.

 

 

Note Gènéthique : Récemment, une équipe de chercheurs chinois s’est servie d’un tel « éditeur de base » pour modifier le code génétique d’embryons humains : Des embryons humains clonés subissent une « chirurgie de l’ADN »

 

[1] L’ADN, support de notre patrimoine génétique est codé par un enchaînement de bases nucléotides : l’adénine (A) qui se couple à la thymine (T), et la guanine (G) qui se couple à la cytosine (C).

[2] Une surcharge en fer héréditaire.

 

AFP (25/10/2017); Huffington post (25/10/2017)

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