CRISPR : des chercheurs s’attaquent aux tumeurs solides

Publié le 14 Nov, 2022

Des chercheurs ont utilisé l’outil d’édition génétique CRISPR-Cas 9 pour modifier les cellules immunitaires[1] de patients atteints de cancer, leur permettant de « concentrer leur attaque sur les cellules cancéreuses » sans endommager les cellules normales. Ce procédé, qui n’a pas nécessité la mise en œuvre d’un vecteur viral, est une première assurent les scientifiques. Leurs travaux, codirigés par le Dr Ribas et le Dr Baltimore, ont été est présentés lors l’édition 2022 du congrès de la Society for Immunotherapy of Cancer (SITC), et publiés dans la revue Nature[2].

Vers une immunothérapie plus efficace

Un cancer apparaît lorsque des cellules mutent et se divisent de manière incontrôlée. Chaque cancer est dû à un ensemble unique de mutations, et chaque personne possède des cellules immunitaires dotées de récepteurs capables de reconnaître ces mutations, et de différencier les cellules cancéreuses des cellules normales. Mais, souvent, les patients n’ont pas assez de cellules immunitaires dotées de ces récepteurs pour organiser une réponse efficace contre leur cancer.

Dans cet essai de phase 1, les chercheurs ont identifié les récepteurs de chaque patient, les ont insérés dans les cellules immunitaires qui en sont dépourvues[3], et ont cultivé davantage de ces cellules modifiées. Ensuite, ces cellules immunitaires ont été libérées dans la circulation pour attaquer la tumeur.

« Ce que nous essayons de faire, c’est d’exploiter les mutations spécifiques de la tumeur de chaque patient », explique Stefanie Mandl, responsable scientifique de la société Pact Pharma impliquée dans l’étude.

Une thérapie personnalisée

Les chercheurs ont commencé par séparer les lymphocytes T du sang de 16 patients atteints de tumeurs solides, notamment de cancers du côlon, du sein ou du poumon. L’équipe a choisi jusqu’à trois récepteurs pour chaque patient et, à l’aide de l’outil Crispr, a ajouté en laboratoire les gènes de ces récepteurs aux cellules T du patient.

Les scientifiques ont ensuite cultivé « suffisamment » de cellules modifiées pour constituer ce qu’ils espéraient être une dose thérapeutique. Puis, ils ont réinjecté les cellules modifiées à chacun des volontaires, qui avaient tous été traités auparavant par plusieurs séries de chimiothérapie. Les cellules T modifiées se sont déplacées vers les tumeurs et les ont infiltrées.

Des résultats mitigés

Chez six des seize patients, la thérapie expérimentale a gelé la croissance des tumeurs. Chez les autres, le cancer a progressé, ce que le Dr Mandl attribue au stade avancé de la maladie[4].

Les patients ont subi les effets secondaires inhérents à la chimiothérapie, mais deux patients ont eu des effets liés aux cellules modifiées génétiquement : de la fièvre et des frissons pour l’un, de la confusion pour l’autre. Les chercheurs affirment qu’ils se sont rétablis « rapidement ». Pour le Dr Ribas, cette étude démontre la « faisabilité » du procédé.

 

[1] Les lymphocytes T

[2] Antoni Ribas, Non-viral precision T cell receptor replacement for personalized cell therapy, Nature (2022). DOI: 10.1038/s41586-022-05531-1www.nature.com/articles/s41586-022-05531-1

[3] La nouveauté de ces travaux réside dans le fait d’avoir à la fois supprimé et ajouté des gènes dans les cellules immunitaires en une seule étape.

[4] Le choix des récepteurs peut aussi être en cause. Les tumeurs solides sont par ailleurs plus difficiles à traiter que les cancers du sang.

Sources : Medical Xpress, University of California, Los Angeles (10/11/2022) ; Wired, Emily Mullin (10/11/2022) – Photo : iStock

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