Prélèvement d’organes après arrêt des traitements : Une profonde réflexion reste à mener en France

Publié le 21 Juin, 2016

A la veille de la « Journée nationale de réflexion sur le don d’organes » du 22 juin, l’AP-HP a rendu publique une « première » dans le domaine du prélèvement d’organes : « Des poumons ont été prélevés après ‘arrêt des thérapeutiques’ », début mai à l’hôpital Bicêtre (Paris). Il s’agit d’un prélèvement d’organes dit « de type Maastricht III », c’est-à-dire « sur un donneur décédé après une décision de limitation ou d’arrêt des thérapeutiques prise en raison du pronostic péjoratif du patient ».

 

La mise en place du protocole Maastricht III en France remonte à 2014, sous le contrôle de l’Agence de Biomédecine. Plusieurs hôpitaux ont reçu une autorisation : la Pitié Salpêtrière (Paris), le CHU de Nantes, et les centres hospitaliers d’Annecy Genevois et La Roche sur Yon (cf. L’hôpital de la Roche-sur-Yon autorisé à prélever des organes après arrêt des traitements ). La « phase pilote » s’achèvera fin 2016 et l’ABM prévoit ensuite un développement à plus grande échelle. Ce type de prélèvement est également réalisé en Belgique, Espagne, et au Canada.

 

Le patient prélevé début mai était « pris en charge à l’hôpital Bicêtre. Après son décès [et après accord de la famille], une circulation extracorporelle a été mise en place ». Avec la collaboration de l’équipe de coordination hospitalière de prélèvement, ses poumons, son foie, ses reins et tissus ont été prélevés et « ont ensuite été greffés à des patients inscrits sur liste d’attente ». C’est « la première fois en France que des poumons ont été prélevés dans les conditions du protocole Maastricht III ».

 

Le docteur Gaëlle Cheisson, responsable médicale de la coordination de prélèvement des hôpitaux universitaires de Paris Sud explique que « ce type de don est rendu possible grâce à l’évolution des lois de bioéthique et aux apports des techniques innovantes » ; elle se félicite de « contribuer à l’amélioration de l’accès à la transplantation pour les malades en attente de greffe ».

 

Jean Yves Nau constate que cette « première mérite quelques réflexions ». Il rapporte les propos « redoutables » d’Aurélie Rossignol dans le Parisien : « Les Maastricht III, c’est à dire les patients que l’on maintient en vie, comme le tétraplégique en état végétatif Vincent Lambert, étaient jusqu’alors exclus du protocole de don. Des questions d’ordre éthique freinaient en effet cet élargissement. Certains professionnels et associations craignent que l’on pousse dans le sens d’un arrêt des soins rapide pour augmenter les dons d’organes et la qualité de ces derniers (moins on attend, moins les traitements palliatifs abîment les organes)». Ces phrases « résument à elles seules la profonde réflexion qui reste à mener, en France, sur un tel sujet. Moins on attendra, mieux ce sera », conclut Jean Yves Nau.

 

Note de Gènéthique :

Le Parisien, Aurélie Rossignol (21/06/2016); Jean Yves Nau (22/06/2016)

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