Pour éviter de transmettre le cancer du sein à son enfant, une femme autorisée à pratiquer un DPI

Publié le 22 Juin, 2015

Pour la première fois en France, à Montpelier, une femme risquant de transmettre le gène BRCA1, prédisposant au cancer du sein, a été autorisée à entreprendre un diagnostic préimplantatoire (DPI). Cette pratique consiste à « sélectionner, à l’issue d’une fécondation in vitro, un embryon non porteur du gène de prédisposition » (cf. Synthèse Gènéthique du 17 juin 2015).

 

Pratiquée depuis les années 90 et autorisée en France en 1999, le DPI n’est en principe une option que pour les couples risquant de transmettre une maladie génétique d’une particulière gravité, « incurable au moment du diagnostic ». S’agissant d’un cancer, les conditions qui doivent être réunies pour avoir recours au DPI sont « un risque tumoral élevé, l’âge précoce auquel survient la maladie, l’incurabilité ou un traitement au prix de séquelles invalidantes ». Or, dans le cas du gène BRCA1, la survenue de la maladie liée à cette mutation génétique n’est pas certaine, n’apparaît qu’à l’âge adulte, et des thérapeutiques existent même si elles peuvent être mutilantes (ablation des deux seins ou des ovaires par exemple).

 

Le philosophe Pierre Le Coz, ancien membre du Comité consultatif national d‘éthique (CCNE) s’inquiète : « La nouvelle peut jeter un trouble, laissant craindre à certains des dérives ».

« L’aspect psychologique entre en ligne de compte » explique le généticien Pascal Pujol qui déclare que « dans certaines situations particulières, la demande des couples doit pouvoir être entendue ». « C’est le cas du couple en question, la jeune femme n’a connu ni sa mère, ni sa tante, ni sa grand- mère, qui sont toutes mortes très jeunes d’un cancer du sein », déclare-t-il. Ce traumatisme a compté dans la décision du Centre pluridisciplinaire d’autoriser le DPI « dans ce cas précis de maladie grave, mais pas incurable ».

 

Dominique Stoppa-Lyonnet, chef du service de génétique à l’Institut Curie et professeur à l’université Paris-Descartes, s’accorde avec Pierre Le Coz et Pascal Pujol pour dire que l’autorisation accordée ne « constitue pas un tournant ». « On reste bien dans le cadre de la loi, qui fixe des critères stricts tout en laissant une marge d’appréciation indispensable aux médecins » souligne Pascal Pujol. Jean-François Mattei, professeur de pédiatrie et de génétique médicale, met cependant en garde contre « un risque d’eugénisme réel à terme ». Faisant référence au diagnostic prénatal à grande échelle de la trisomie 21, il explique que « chaque petit pas peut sembler anodin mais on finit par se retrouver là où on ne pensait jamais aller ».

 

La Croix (Marine Lamoureux) 21/06/2015

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