Le dernier des trois forums publics des Etats-Généraux avait lieu hier à Strasbourg. A l’ordre du jour : le don d’organes et la médecine prédictive.
En France, en 2007, on compte près de 5000 greffes, avec 13 000 personnes en attente, et 200 décès faute d’avoir pu bénéficier à temps d’un don d’organes. C’est donc une pratique reconnue, dont le cadre législatif repose sur les principes suivants : l’anonymat, la gratuité, le consentement présumé du donneur.
Si la pratique du don d’organes et de la greffe, n’est pas remise en cause, la question du consentement présumé fait l’objet de nombreuses interrogations. En France, chacun est en effet supposé pouvoir être prélevé, sauf s’il a manifesté de son vivant son refus. Le consentement présumé est-il conforme au principe de consentement éclairé et à la notion de don indispensables pour sauvegarder l’éthique ? Par ailleurs comment faire lorsque la famille s’oppose au prélèvement ? Dans la pratique, les équipes médicales ne passent jamais outre l’avis familial, mais privent en même temps des patients en attente de greffe. Le panel s’est également vu soucieux de voir clairement défini l’état de mort cérébrale, condition sine qua non de tout prélèvement, ainsi que des conditions de prélèvement respectueuses du corps de la personne décédée prélevée (95% des prélèvements sont effectués après la mort du donneur).
Concernant la gratuité du don, il s’agit de se prémunir contre les risques de marchandisation du corps humain, et notamment d’éviter le trafic d’organes au niveau international : comment éviter par exemple que des habitants de pays démunis ne vendent un de leur rein au profit d’un malade de pays riche ? Le Pr Jacques Belghiti, spécialiste de la greffe du foie, fait pourtant remarquer : "Nous avons tous la préoccupation légitime de ne pas indemniser le don, mais encore faut-il que le donneur vivant ne soit pas, lui, pénalisé."
Enfin, concernant les donneurs vivants, qui constituent 5% des prélèvements en vue des greffes, les débats ont porté sur la possibilité d’un élargissement de leur cercle. Jusqu’à présent, il est possible de donner de son vivant un rein ou un foie à un membre de sa famille ou à une personne avec qui on partage une vie commune depuis au moins deux ans. A l’éventualité d’une extension du don aux personnes liées par des liens d’amitié, le Pr Didier Sicard, président d’honneur du Comité consultatif national d’éthique, a objecté: "Plus on élargit le cercle familial ou amical des donneurs, plus on élargit ce qu’on pourrait appeler une ‘ demande de comptes’ du donneur qui, quelques années plus tard, pourrait aller voir le receveur en lui disant : ‘Je t’ai donné la vie. Comment comptes-tu me rembourser ?’"
La Croix (Pierre Bienvault) 17/06/09 – Libération (Eric Favereau) 17/06/09 –