Un manque de transparence réel est pointé dans le système chinois des transplantations d’organes. Après des années de controverses sur l’exécution de prisonniers politiques en vue de prélever leurs organes, la Chine a bien interdit cette pratique en 2015, rendant obligatoire le système de donation volontaire mis en place en 2013 (cf. La Chine prend des mesures pour encadrer le don d’organes). Officiellement Huang Jiefu, responsable du dispositif chinois des greffes d’organes, assure qu’il y a une « tolérance zéro », pourtant il a admis lui-même l’année dernière être « certain qu’il y a des violations de la loi ».
Plus de 16 000 greffes ont été réalisées en Chine en 2017, qui est le deuxième pays du monde pour ce type d’interventions après les Etats-Unis. Mais, se basant sur les taux d’occupation des lits des 178 hôpitaux réalisant des greffes dans le pays, l’organisation China Organ Harvest Research Center estime que « des milliers d’autres ont dû avoir lieu ». Selon les chiffres publiés par l’Etat, en 2013, 23 % des transplantations étaient issues de dons volontaires, 80 % en 2014, et 100 % en 2015. « Ce n’est pas plausible qu’une transition complète ait pu avoir lieu en un ou deux ans, explique l’organisation, d’autant que la plupart des Chinois pensent qu’ils se réincarneront après leur mort, ce qui suppose d’avoir un corps intact et limite le nombre de candidats au don » (cf. Le don d’organes ne fait pas partie de la culture chinoise ). China Organ Harvest Research pense par exemple que les prélèvements continuent à se faire sur les prisonniers, qui ont été préalablement inscrits au registre des donneurs volontaires pour contourner l’interdiction.
Human Rights Watch (HRW) et Amnesty International, de leur côté, pointent le peu de preuves permettant de corroborer ces allégations, mais reconnaissent tout de même le « manque de transparence » évident du système chinois.
Il existe par ailleurs toujours des soupçons autour de l’existence d’un « tourisme de la greffe » en Chine. Certains hôtels promettraient des greffes en quelques semaines à leurs touristes étrangers. Des pratiques niées en bloc par Huang Jiefu, qui participait cette semaine à Madrid au congrès annuel de la Société de Transplantation. Francis Delmonico, chirurgien américain de renom, y voit « un témoignage important de l’évolution de la Chine ».
Pour aller plus loin :
Un rapport canadien dénonce près de 90 000 greffes clandestines en Chine
La Chine mettra fin au prélèvement d’organes sur ses prisonniers exécutés en 2015
Les condamnés chinois, toujours principale source opaque de “don” d’organes ?
La Chine lance une politique d’encouragement au don d’organes volontaire
AFP, Marianne BARRIAUX (06/07/2018)