Sur l’interdiction européenne de breveter des inventions utilisant des cellules souches embryonnaires humaines

Publié le 12 Déc, 2011

Christine Noiville, juriste, chercheur au CNRS et présidente du Comité économique, éthique et social au Haut Conseil des biotechnologies dans Le Quotidien du Médecin et Pierre-Olivier Arduin, responsable de la commission bioéthique du diocèse de Fréjus-Toulon dans La Nef, reviennent sur la décision de la Cour européenne de justice, excluant "de la brevetabilité toute invention utilisant des lignées cellulaires dont la constitution a entraîné la destruction d’un embryon".
Christine Noiville explique qu’en se prononçant sur l’affaire d’Olivier Brüstle (Cf Synthèse de presse du 13/01/11), la Cour se trouvait confrontée à la question de de l’instrumentalisation de l’embryon humain. Elle souligne la fermeté du choix posé par la justice qui refuse que "l’utilisation des cellules ES" (souches embryonnaires) devienne "une alternative à la recherche sur l’embryon". Si ces cellules ES sont déjà "stockées en banque dans des tubes à essai, […] de toute façon déjà disponibles", la Cour "balaye" ce "tour de passe passe" faisant de l’usage des cellules souches embryonnaires humaines une "alternative" à la recherche sur l’embryon humain afin de se "donner bonne conscience à trop bon compte". Elle réaffirme que "peu importe que la destruction de l’embryon soit intervenue à un stade largement antérieur à la mise en œuvre de l’invention, il y a bien à l’origine destruction d’un embryon et donc exclusion de la brevetabilité".
Christine Noiville déplore toutefois que cet arrêt, même s’il n’interdit pas la recherche sur l’embryon humain, constitue "un frein" à celle-ci. Elle ajoute que "la R et D exigent des investissements importants qu’il faut rentabiliser par une protection juridique adéquate", soit des brevets.

Au-delà de ces conséquences économiques, cet arrêt du 18 octobre 2011 possède, selon Pierre-Olivier Arduin, "une dimension morale qu’il convient de mettre en relief". En interdisant le brevetage de "toutes les innovations techniques "attentatoires à la dignité humaine"", en précisant que "tout ovule humain, dès le stade de la fécondation, doit être considéré comme un embryon humain" de même que "tout ovule humain dans lequel le noyau d’une cellule humaine mature a été implanté", soit tout organisme humain cloné, les 13 juges européens ont pris "la notion d’embryon humain […] au sens large". Aucune instance aussi importante ne s’était jusqu’alors prononcé juridiquement sur le début de l’existence humaine et la dignité de l’embryon humain. Pierre-Olivier Arduin se réjouit que cet arrêt, qui s’impose aux 27 Etats de l’Union européenne, "soustrait l’être humain in vitro aux appétits financiers de l’industrie pharmaceutique et des lobbies scientifiques, et pourrait ainsi contribuer à réorienter la recherche en direction de sources alternatives".

Le Quotidien du Médecin (Dr Lydia Archimède) 12/12/11 – La Nef (Pierre-Olivier Arduin) décembre 2011

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