Une équipe de chercheurs[1] a montré que l’injection d’un type de cellules souches dans le cerveau de patients atteints de sclérose en plaques progressive (SEP)[2] est « sûre, bien tolérée et a un effet durable qui semble protéger le cerveau contre d’autres lésions ». Leurs travaux pourraient constituer une étape vers la mise au point d’une thérapie cellulaire. Ils les ont publiés dans la revue Cell Stem Cell[3].
Une injection directement dans le cerveau
Des travaux antérieurs de l’équipe de Cambridge ont montré, chez la souris, que des cellules cutanées reprogrammées en cellules souches cérébrales, puis transplantées dans le système nerveux central, peuvent contribuer à réduire l’inflammation, et à réparer les lésions causées par la sclérose en plaques.
Cette nouvelle recherche constitue un premier essai chez l’homme. Des cellules souches neurales ont été injectées directement dans le cerveau de 15 patients.
Les cellules souches ont été obtenues à partir de cellules prélevées dans le tissu cérébral d’un « donneur fœtal unique », après une fausse couche. L’équipe italienne avait déjà montré qu’il serait possible de produire une quantité « pratiquement illimitée » de ces cellules souches à partir d’un seul donneur. A l’avenir, il pourrait être possible de dériver ces cellules directement du patient, « ce qui permettrait de surmonter les problèmes pratiques associés à l’utilisation de tissus fœtaux allogéniques », indiquent les chercheurs.
Ni décès ni événement indésirable grave
L’équipe a suivi les patients pendant 12 mois, au cours desquels elle n’a observé aucun décès lié au traitement, ni aucun événement indésirable grave. Bien que certains effets secondaires aient été observés, ils étaient tous temporaires ou réversibles, affirment les scientifiques.
Tous les patients présentaient des niveaux élevés d’invalidité au début de l’essai. La plupart avaient besoin d’un fauteuil roulant par exemple. Au cours de la période de suivi de 12 mois, aucun n’a montré d’augmentation de l’invalidité ou d’aggravation des symptômes. Aucun des patients n’a signalé de symptômes suggérant une rechute et leur fonction cognitive ne s’est pas non plus détériorée de manière significative au cours de l’étude. Ainsi, globalement, selon les chercheurs, la maladie est demeurée « stable », sans signe de progression, « bien que les niveaux élevés d’invalidité au début de l’essai rendent cette affirmation difficile à confirmer ».
De premiers résultats encourageants
Les chercheurs ont évalué un sous-groupe de patients pour déterminer les changements dans le volume du tissu cérébral associés à la progression de la maladie. Ils ont constaté que plus la dose de cellules souches injectées était importante, plus la réduction de ce volume cérébral était faible au fil du temps. Ils supposent que cela pourrait être dû au fait que la greffe de cellules souches a atténué l’inflammation.
L’équipe a également cherché des signes indiquant que les cellules souches avaient un effet neuroprotecteur, c’est-à-dire qu’elles protégeaient les cellules nerveuses contre d’autres dommages. Ils ont examiné comment le métabolisme du cerveau se modifie après le traitement. Ils ont pu trouver « certains signes liés à la façon dont le cerveau traite les acides gras ». Plus la dose de cellules souches était élevée, plus les niveaux d’acides gras étaient importants et persistaient sur une période de 12 mois.
Le professeur Stefano Pluchino de l’université de Cambridge, qui a codirigé l’étude, s’est déclaré « prudemment très enthousiaste » quant à ces résultats. « Nous reconnaissons que notre étude a des limites – il s’agissait d’une petite étude et il peut y avoir eu des effets confondants des médicaments immunosuppresseurs, par exemple, tempère-t-il, mais le fait que notre traitement était sûr et que ses effets ont duré pendant les 12 mois de l’essai signifie que nous pouvons passer à l’étape suivante des essais cliniques ».
[1] L’essai a été mené par des équipes de l’université de Cambridge, de l’université Milan Bicocca, des hôpitaux Casa Sollievo della Sofferenza et S. Maria Terni en Italie, de l’Ente Ospedaliero Cantonale en Suisse, et de l’université du Colorado.
[2] Plus de deux millions de personnes vivent avec la sclérose en plaques dans le monde. Le système immunitaire de leur organisme attaque et endommage la myéline, la gaine protectrice qui entoure les fibres nerveuses, ce qui perturbe les messages transmis dans le cerveau et la moelle épinière.
Les principales cellules immunitaires impliquées dans ce processus sont les macrophages qui, normalement, « attaquent et débarrassent le corps des intrus ». Un type particulier de macrophage, appelé cellule microgliale, est présent dans le cerveau et la moelle épinière. Dans les formes progressives de la SEP, elles attaquent le système nerveux central, provoquant une inflammation chronique et des lésions des cellules nerveuses.
[3] Phase I clinical trial of intracerebroventricular transplantation of allogeneic neural stem cells in people with progressive Multiple Sclerosis, Cell Stem Cell (2023). DOI: 10.1016/j.stem.2023.11.001.
Source : Medical Xpress, University of Cambridge (27/11/2023) – Photo : iStock