es médias reviennent largement sur le cas de Chantal Sébire, cette patiente de 52 ans atteinte d’une tumeur incurable, qui demande à la justice le droit d’être "euthanasiée" (cf. Synthèse de presse du 13/03/08). Le président du tribunal de grande instance de Dijon a mis son jugement en délibéré à lundi. Il a néanmoins requis l’irrecevabilité de la demande de Chantal Sébire. "Comme souvent dans ce genre d’histoires largement médiatisées, on est dans la confusion des situations, mélangeant suicide assisté et euthanasie passive, drames singuliers et réponses collectives", souligne Libération.
Bouleversée par cette situation, la ministre de la Santé, Roselyne Bachelot, a toutefois rappelé que, si les médecins doivent soulager les patients, leur intervention "ne peut avoir pour effet dans notre droit et dans notre philosophie de la vie de mettre fin à la vie des patients" ; "la mort ne peut en aucun cas procéder d’un projet auquel le corps médical est associé". Pour Roselyne Bachelot, cette problématique relève de l’éthique de notre pays et "une démarche éthique ne s’adapte pas à des cas particuliers". "Le monde médical, les pouvoirs publics ne peuvent promouvoir l’euthanasie active quelle que soit la gravité de la maladie", a-t-elle répété. Enfin, elle a conclu en disant ne pas vouloir revenir sur la loi Leonetti sur la fin de vie de 2005.
Le député Jean Leonetti, auteur de la loi sur la fin de vie actuellement en vigueur, estime que la demande de suicide assisté de Chantal Sébire "n’entre pas dans le cadre de la loi". "La loi autorise l’utilisation de sédatifs, de calmants, d’antalgiques à des doses nécessaires pour supprimer toutes douleurs physiques ou morales, même si l’utilisation de ces médicaments abrègent la vie. Or Mme Sébire refuse les sédatifs. Elle demande qu’on lui donne la mort", a-t-il expliqué. Pour lui, cette demande "confine à une impasse, car en réalité elle rompt le dialogue entre le corps médical et le malade". "Je suis prêt de manière apaisée, et non pas à partir de cas individuels, à réfléchir sur des problèmes majeurs de société, sans présager de la décision législative", poursuit-il, avant de conclure en disant que : "le débat sur le suicide assisté est beaucoup plus complexe et large. Le suicide est une liberté, pas un droit revendiqué".
"Très touché" par la lettre que lui avait adressée cette patiente, Nicolas Sarkozy n’entend pas modifier pour autant la loi en vigueur. "Nous n’avons pas le droit d’interrompre volontairement la vie", a-t-il déclaré. Le président de la République a demandé à son conseiller, le professeur Arnold Munnich (chef de service à l’hôpital Necker), de contacter Chantal Sébire pour s’assurer que toutes les ressources médicales ont été épuisées.
Bernard Senet, médecin généraliste et membre de l’Association pour le droit de mourir dans la dignité (ADMD), se scandalise de la proposition du chef de l’Etat : "c’est du mépris. (…) On ne répond pas à son appel". Il a par ailleurs accepté d’aider Chantal Sébire à mourir, si la justice l’y autorise.
Christine Boutin s’est elle indignée de "l’instrumentalisation de la détresse de cette femme pour pouvoir arriver à légaliser l’euthanasie".
Dans sa Lettre apostolique aux personnes âgées (1999), Jean-Paul II rappelait que l’euthanasie "demeure un acte intrinsèquement mauvais" et que, s’"il peut arriver que, dans le cas de maladies graves accompagnées de souffrances insupportables, les personnes éprouvées et leurs proches se sentent enclins à tenir pour raisonnable la solution de la "mort douce"", "malgré les intentions et les circonstances, l’euthanasie demeure une violation de la loi divine, une offense à la dignité de la personne humaine".
Dans son avis du 27 janvier 2000, le Comité consultatif national d’éthique (CCNE), s’était déclaré favorable à l’instauration légale d’une "exception d’euthanasie". Celle-ci "devrait faire l’objet d’un examen en début d’instruction ou de débats d’une commission interdisciplinaire chargée d’apprécier le bien-fondé des prétentions des intéressés au regard (…) des mobiles qui les ont animés (…). Le juge resterait bien entendu maître de la décision", expliquait l’avis. Le Dr Emmanuel Debost, médecin traitant de Chantal Sébire, pense, lui aussi, que "des situations totalement exceptionnelles (…) peuvent nous conduire à réfléchir collectivement à une exception d’euthanasie, après une décision forcément collégiale".
Rappelons enfin que, hier, le Premier ministre, François Fillon, et la garde des sceaux, Rachida Dati, ont jugé que la loi en vigueur était suffisante (cf. Synthèse de presse du 13/03/08).
Le Figaro.fr 13/03/08 – Nouvel Obs.com 13&14/03/08 – Le Point.fr (Cyriel Martin) 13/03/08 – Le Figaro (Agnès Leclair) 14/03/08 – Libération (Eric Favereau) 14/03/08 – La Croix (Pierre Bianvault, Marianne Gomez, Claire Lesegretain, Gwenaëlle Moulins) 14/03/08 – Ouest France.fr 14&15/03/08 – RTL Info 14/03/08 – France Info 17/03/08 – JDD.fr (Rémi Duchemin) 14/03/08