Au printemps 2020, le nombre de décès recensés au Québec a dépassé celui des naissances. Le « premier recul de la croissance naturelle de la population jamais observé à cette période de l’année ». « 21 100 décès sont survenus au second trimestre de 2020 », entre les mois d’avril et juin, soit « plus de 4300 décès par rapport à la même période en 2019 ». Sur la même période, 20 750 enfants ont vu le jour. Un « recul démographique » qui ne concerne « que la croissance “naturelle” de la population, et ne tient pas compte des apports migratoires et des migrations interprovinciales qui comptent pour beaucoup dans la croissance démographique du Québec », précise Chantal Girard, démographe à l’Institut de la statistique du Québec (ISQ).
« Pour le 2e trimestre, c’est du jamais vu un solde négatif », affirme-t-elle. « C’est fort probablement l’année qui va se démarquer de toutes les autres, estime-t-elle. Oui, le lien avec la COVID est assez clair, mais les données finales nous permettront de savoir avec plus d’exactitude s’il y a aussi d’autres causes en jeu ». Selon l’analyste, un tel phénomène n’avait été observé qu’une seule fois récemment. « C’était à l’hiver (janvier à mars) 2018, à l’occasion d’une saison de grippe particulièrement meurtrière, et à un moment de l’année marqué par une baisse saisonnière dans les naissances. » « Depuis déjà plusieurs années, l’accroissement naturel est à la baisse car la population vieillit », déclare Chantal Girard. Mais pour le moment, « le solde annuel net demeure encore positif, avec 15 à 20 000 nouveau-nés recensés de plus que de personnes décédées ». « L’année 2020 s’annonce tout autre. »
« Une des grandes questions qui demeurent par rapport à l’impact de l’épidémie actuelle, c’est de savoir si plusieurs des décès ont été simplement devancés dans le temps, de quelques mois, ou d’un ou deux ans. On ne le sait pas, estime Chantal Girad. De la même façon, on ignore encore quel sera l’impact de l’épidémie sur les naissances ». Selon elle, « en période de crise, économique entre autres », on enregistre « habituellement » une diminution du nombre de naissances. Mais « les couples vont-ils seulement reporter leur projet d’enfant ou tout simplement l’abandonner ? »
Source : Le Devoir, Isabelle Paré (17/09/2020)