L’autoconservation des ovocytes est « tout sauf une avancée pour les femmes »

Publié le 19 Jan, 2016

La France, contrairement aux autres pays européens, réserve la congélation des ovocytes aux patientes « qu’un traitement médical risque de rendre stériles ou à celles qui soufrent d’une endométriose sévère ». Cette technique consiste à « vitrifier (congeler rapidement) ses ovules et à les stocker par moins 196°C dans de l’azote liquide ». L’autoconservation est autorisée dans les pays européens dans l’objectif de « lutter contre la baisse de la fertilité liée à l’âge ».

 

L’arrêté publié le 8 janvier ouvre le don de gamètes aux personnes sans enfants (cf. Publication de l’arrêté qui élargit le don de gamètes), et prévoit que les donneuses pourront « préserver une partie de leur gamètes pour leur usage ». Certains y voient une « ouverture très limitée », puisque « seules les femmes les plus fertiles – et donc les plus jeunes – pourront mettre de côté suffisamment d’ovocytes pour avoir une chance réelle de grossesse le jour où elles le décideront ». Cette « ouverture » est par ailleurs considérée comme « un chantage scandaleux », « un marché de dupes » qui n’irait pas assez loin. Les hommes, quant à eux, avaient déjà la possibilité d’autoconserver leurs gamètes.

 

Les partisans de l’autoconservation de gamètes voient dans cette technique une façon de « suspendre son horloge biologique », qui se justifie par l’« allongement des études, une meilleure maîtrise de la contraception, l’investissement dans la vie professionnelle, la formation du couple plus tardive et moins stable… ». « Au nom de quoi ne prendrait-on pas en charge le vieillissement des gamètes alors qu’on traite celui des artères, du cœur des articulations ? » s’interroge le Dr Aubriot, gynécologue à l’hôpital Port Royal, à Paris et au centre de FIV de la clinique Cherest à Neuilly sur Seine. Pour Virginie Rio, porte parole du collectif

BAMP[1], l’ « autoconservation n’est pas une question de société mais un acte de prévention médicale pour préserver sa fertilité et éviter l’échec de FIV à répétition ».

 

Une « victoire sur le temps » ? Au contraire, pour Dorothée Werner, éditorialiste du magazine Elle, « cette technique n’est pas un ‘progrès’ mais un problème sociétal pris à l’envers. Parce que choisir entre sa vie privée et sa vie professionnelle est tout sauf une avancée pour les femmes ». Elle y voit même l’« échec du combat féministe ». Car l’« idée qu’il faut changer le corps des femmes pour les plier à la norme sociale du travail plutôt que de changer la norme est un choix politique contestable ». Elle dénonce le fait que l’« on nie l’aspect médical de l’acte (…) mais aussi l’aspect psychique (…) tout en dramatisant l’enjeu du choix d’un futur père idéal et du moment idyllique pour être enceinte ».

 

[1] BAMP est « une association de patients AMP et de personnes infertiles » qui milite puor « faire évoluer l’AMP en France ».

 

Elle (18/01/2016)

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