France : Le fragile ”encadrement” législatif du DPI

Publié le 10 Nov, 2008

Alors qu’une future directive européenne sur la protection des animaux utilisés en laboratoire devrait réduire au minimum la recherche sur les grands singes – les tests ne seront autorisés que pour préserver les espèces, en cas de menace de pandémie et si rien ne peut remplacer les tests sur les grands primates – Pierre Olivier Arduin, responsable de la commission bioéthique du diocèse de Fréjus-Toulon, revient sur la question du diagnostic préimplantatoire (DPI) et de son utilisation pour la recherche.

Il dénonce un "eugénisme à mots couverts" et s’inquiète  des nouvelles propositions pour élargir le DPI. Actuellement, l’enfant à naître est soumis à toutes formes d’exigence. Avec le diagnostic prénatal (DPN), si la moindre anomalie est détectée dans le ventre de la mère, l’enfant est "passible d’interruption médicale de grossesse (IMG)". Pierre Olivier Arduin rappele que l’IMG a augmenté de 10% entre 2005 et 2006.

Dans le cadre de l’assistance médicale à la procréation (AMP), l’enfant à naître est passé au crible du dépistage avant d’être réimplanté dans le ventre de la mère avec le diagnostic préimplantatoire (DPI). Si une anomalie est détectée, "c’est une destruction à plus ou moins brève échéance qui l’attend. En effet, le décret du 6 février 2006 stipule que les embryons rejetés par DPI peuvent être livrés aux équipes scientifiques qui en font la demande auprès de l’Agence de biomédecine".

Reprenant le document de travail du Sénat sur le DPI qui étudie les dispositions législatives de neuf pays européens, Pierre-Olivier Arduin relève que des pays importants comme l’Allemagne, l’Autriche, l’Italie ou la Suisse interdisent le DPI. En France, la pratique du DPI est "encadrée de façon très stricte" et la loi de bioéthique du 20 juillet 1994 ne l’autorise "qu’à titre exceptionnel" lorsqu’un couple "du fait de sa situation familiale a une forte probabilité de donner naissance à un enfant atteint d’une maladie génétique d’une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du  diagnostic" (article L. 213164 du CSP).

"Autre argument avancé : le DPI est un acte biotechnique proposé avec parcimonie", pour les maladies rares comme la mucoviscidose, l’hémophilie, différentes formes de myopathies ou la malade de Huntington. Pierre-Olivier Arduin s’interroge sur le fait qu’aucune liste de ces affections n’existe et redoute l’issue d’une telle pratique : "le DPI est en effet sensé aboutir à terme à une disparition complète de la pathologie en éliminant à la source tous les sujets porteurs de gène défectueux". "Or le caractère soi-disant exceptionnel de cette pratique est en train d’être totalement remis en cause par les scientifiques". Un début de polémique  a commencé sur l’extension du DPI à la recherche de prédispositions génétiques comme certaines affections cancéreuses, alerte-t-il. "L’Agence de biomédecine en a approuvé le principe  au mois de mars (…) et le Sénat demande que cette question soit débattu lors de la prochaine révision de la loi de bioéthique." Cette question est d’autant plus préoccupante qu’une nouvelle technique de séquençage à très haut débit des génomes humains vient d’être révélé par le Pr Alan Handsyde de Londres.

Rappelant les propos du Pr Jacques Testard, père du premier "bébé éprouvette", qui avait prévenu que "le contrôle systématique et rigoureux de tous les embryons conçus par AMP était l’objectif ultime de la recherche sur le DPI", Pierre Olivier Arduin conclut : "s’il ne se produit pas un sursaut des consciences, tout laisse à penser que le "DPI universel" sera à moyen terme l’instrument technique qui rendra effectifs nos rêves fous de pureté génétique".

www.libertepolitique.com (Pierre-Olivier Arduin) 06/11/08 – www.nouvelobs.com 06/11/08

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