Alors que le projet de loi fédérale sur l’aide médicale à mourir sera bientôt adopté au Canada (cf : Canada : quatre mois supplémentaires accordés pour la mise en place de l’aide médicale à mourir), les enjeux éthiques demeurent. La Commission de l’éthique en science et en technologie (CEST) s’est penché sur la question du don d’organes dans ce contexte, et a rendu publiques ses recommandations hier pour éviter les dérives. Sa conclusion : « la légalisation de l’aide médicale à mourir ne doit pas ouvrir la porte à des pressions indues pour convaincre les malades admissibles à donner leurs organes ».
Le point délicat en effet, c’est que les deux demandes sont conciliables. Pour la CEST, il est donc impératif de mettre en place les conditions nécessaires : que les deux demandes soient traitées indépendamment, l’une après l’autre, la demande d’euthanasie devant être la première, et relever de deux équipes distinctes. « Il doit y avoir une parfaite étanchéité entre les deux » a répété Edith Deleury, présidente de la CEST, qui veut éviter que l’on puisse « établir [un lien] de cause à effet entre les deux ».
Pourtant, avec des frontières si minces et l’information des patients sur les pénuries d’organes, comment ne pas « solliciter » ? Pour Marie-José Clermont, du CHU Sainte-Justine, il faut rapidement mettre en place des mécanismes clairs dans la mesure où une double demande pourrait se présenter « dès aujourd’hui ou demain ».
Manon Chevalier, médecin gériatre, affirme quant à elle que le don d’organes ne correspond pas au « type de mort » souhaité par les demandeurs d’aide médicale, et qu’il faut les informer sur le fait qu’ils ne pourront pas mourir à leur convenance à domicile, mais dans la salle d’opération d’un établissement où le prélèvement est possible.
Pour la Commission, « le don d’organes peut permettre de donner un sens à la mort », mais cet argument ne peut être utilisé pour convaincre qui que ce soit a-t-elle ajouté.
Le devoir, Sarah R. Champagne (12/05/2016)