Euthanasie en Belgique: principaux éléments du débat relancé

Publié le 23 Avr, 2013

Actuellement en Belgique plusieurs propositions de loi sont débattues au Sénat afin d’étendre le champ d’application de la loi sur l’euthanasie (Cf Synthèse de presse Gènéthique du 21/02/2013). Mais deux sujets interrogent davantage: l’ouverture de l’euthanasie aux mineurs et la légitimité de la clause de conscience.

 
Au vu de l’application de la loi de 2001 aux Pays-Bas et celle de 2002 en Belgique, un auteur anglo-saxon considère que l’on est sur une pente glissante. En effet, considérée comme une “option ultime dans des situations spécifiques“, l’euthanasie “a vu avec le temps ses indications s’élargir […] et son application apparaître dans des situations non imaginées au moment du vote il y a douze ans“.
 
Alors qu’une accélération des débats sur l’extension de l’euthanasie aux mineurs est demandée par certains sénateurs, d’autres estiment que cela empêcherait toutes les opinions de s’exprimer et le risque serait alors d’obtenir un “texte imprécis et ne posant pas les balises claires“.
 
La proposition de loi prévoit une extension aux mineurs ayant “une capacité de discernement” et aux bébés “n’ayant aucune chance de survie“. Or, en Belgique, l’expérience montre que “grâce aux soins palliatifs prodigués à l’hôpital et à domicile avec l’aide d’équipes de liaison, aucune demande de fin de vie n’a été formulée ces dix dernières années par un mineur d’âge“. De plus, si la douleur est bien contrôlée, sachant que les moyens pouvant être mis en oeuvre pour la soulager sont nombreux, “l’enfant profite [alors] pleinement des derniers moments de sa vie qui lui sont octroyés, tout en étant bien conscient de l’échéance proche“. Les soins palliatifs doivent par conséquent être davantage développés et les équipes soutenues.
Mais elle vise également une extension aux enfants prématurés de 24 à 26 semaines et que “même si la durée de la grossesse excède ce délai, l’équipe médicale peut être convoquée à la demande de chacune des parties en cas de complications graves“. Or, précise l’article, cette disposition est confuse et manque de précision. En effet, certains dénoncent l’utilisation de la notion de “complications graves“: largement interprétée elle “pourrait ouvrir la porte à l’euthanasie d’enfants à terme présentant un handicap mais parfaitement viable“, comme les nouveau-nés présentant une trisomie 21. Cependant, d’autres considèrent que l’adoption, par le Sénat, d’une proposition de loi qui autoriserait l’euthanasie des nouveau-nés présentant un handicap serait paradoxal avec la récente adoption par cette même institution “d’une proposition de révision de la Constitution garantissant le droit des personnes handicapées à bénéficier des mesures qui leur assurent l’autonomie ainsi qu’une intégration culturelle, sociale et professionnelle“.
 
Dans le même temps, le Sénat débat d’une proposition de loi visant notamment à préciser le cadre de la clause de conscience. Actuellement, les médecins peuvent faire valoir une clause de conscience et de nombreux observateurs affirment que des institutions tels que les hôpitaux et les maisons de repos, “ont pour politique de l’intégrer dans leurs relations de travail avec le corps médical“.
 
Gilles Genicot, professeur à l’Université de Liège et membre de la Commission fédérale de contrôle et d’évaluation de l’euthanasie estime “qu’il n’existait pas de fondement juridique permettant de légitimer le fait que des ‘institutions’ de soins aient recours à la clause de conscience“. Et ce sera, selon lui, ce point de vue que retiendra le Comité consultatif de Bioéthique dans l’avis qu’il doit rendre prochainement sur ce sujet.
 
Pour Sylvie Tack, chercheur postdoctorant à l’Université de Gand, on touche ici a deux limites: “celles du ‘droit du patient’ et sa liberté de choix, et celles des ‘droits des collaborateurs’ des institutions, dont les médecins, limités par les obligations liées au travail” notamment. Elle ajoute que “la clause de conscience prévue par la loi sur l’euthanasie se limitait au ‘médecin’ ou une autre ‘personne’ ” et qu’il faudrait alors préciser dans la loi s’il s’agit d’une personne physique. 

 

 

 

 

 

Levif.be 23/04/2013 – Lalibre.be 23/04/2013

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