Don de gamètes ou d’embryon : vers un tourisme procréatif ?

Publié le 31 Jan, 2005
Royaume-Uni : large consultation

 

Les conditions de la procréation médicalement assistée avec donneur, largement pratiquée en Grande-Bretagne vont être modifiées dans les deux années à venir : la loi vient de changer, et à partir d’avril 2005, les donneurs de gamètes ou d’embryons pourront être identifiés par les enfants qu’ils auront contribué à concevoir, si ceux-ci le souhaitent lorsqu’ils ont atteint l’âge de 18 ans.

 

En avril 2006, la directive européenne n°2004/23/CE du 31 mars 2004 sur les tissus et cellules humains1 sera applicable en Grande-Bretagne ; la réglementation existante devra s’adapter, en particulier en ce qui concerne la sécurité et la qualité  des tissus et cellules (dont les gamètes), en provenance de pays non européens. A cette occasion, la HFEA (Human Fertilisation and Embryology Authority), autorité britannique chargée de la reproduction humaine et de l’embryologie, lance une large consultation sur la procréation médicalement assistée avec donneur de sperme, d’ovocytes ou d’embryons, afin de rendre cette pratique plus efficace.

 

Vers une rémunération du don ?

 

Comment dédommager les donneurs ? Doivent-ils être rémunérés, comment compenser les charges induites par le don, les inconvénients de toutes sortes qu’il entraîne et arriver à une estimation réaliste ? Faut-il fixer un dédommagement maximum ou non ?… En matière de don de sperme, les avis semblent diverger entre aucune rémunération et un maximum de 50 £, sachant qu’un donneur peut faire jusqu’à 50 dons en six mois… La compensation financière devrait être nettement plus substantielle pour le don d’ovocytes qui nécessite des procédés médicaux et chirurgicaux invasifs beaucoup plus pénibles tant physiquement que nerveusement. Un niveau de compensation allant de 100 à 1000 £ a été suggéré et sert de base à la réflexion en cours.

 

Le document de la HFEA imagine aussi que la femme donnant ses ovocytes pourrait en contre-partie bénéficier de réduction sur le coût de son propre traitement contre la stérilité. Enfin, à propos du don d’embryon, il semble qu’aucune rémunération ou compensation ne doive être envisagée car il s’agit d’embryons pour lesquels les parents n’ont plus de « projet parental ».

 

Importation de gamètes et d’embryons 

 

Les gamètes (presque toujours le sperme) et des embryons peuvent actuellement être importés, mais il s’agit d’autorisations au cas par cas ; cette pratique va être concernée par les mesures relatives à l’identification des donneurs à compter d’avril 2005 et par la directive sur les tissus et cellules. La HFEA doit-elle continuer à autoriser cette pratique au cas par cas ou doit-elle autoriser les centres agréés à importer des gamètes à discrétion, à condition que les centres étrangers partenaires présentent toutes les garanties dans le recrutement des donneurs et le traitement des gamètes ?

 

Trafic d’ovocytes roumains

 

A ces questions et réflexions répond déjà la pratique : du fait de la difficulté à trouver des ovocytes en Angleterre, un centre de procréation médicalement assistée britannique vient de mettre en place un programme d’échanges avec un établissement roumain, le Global Art Center de Bucarest. Les jeunes donneuses roumaines, âgées de 18 à 34 ans sont sensées être altruistes et donnent volontairement leurs ovocytes alors qu’elles ne présentent aucun problème d’infertilité. Gratuitement ? Il est permis d’en douter quand on sait combien est pénible le traitement de stimulation de l’ovulation et de prélèvement des ovocytes…

 

Le délai d’attente des futures mères britanniques n’est plus que de trois mois, et lorsque la donneuse a été repérée pour ses qualités physiques, médicales et génétiques, il suffit d’envoyer à Bucarest un échantillon de sperme du partenaire. La technique de l’ICSI sera utilisée pour fertiliser les œufs qui seront congelés et il ne restera plus qu’à planifier un voyage à Bucarest pour le transfert des embryons.

 

Les risques de la stimulation ovarienne

 

Pourtant les dangers liés à ces pratiques sont réels. Selon l’OMS, le syndrome de l’hyperstimulation ovarienne est constaté dans 1% des cas et peut entraîner la mort de la patiente. Il augmente avec le développement du don d’ovocytes et rend vulnérables certaines catégories de femmes européennes, victimes du tourisme procréatif.

 

Enfin, la mise sur le marché des gamètes n’est-elle pas une nouvelle forme de prostitution, médicalisée, encadrée juridiquement, au mépris des risques médicaux courus par la femme qui « fournit » les ovocytes ? 

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