Dans le quotidien, La Croix, Alain Privat, directeur de recherche de l’Inserm, revient sur deux évènements récents de notre actualité : l’autorisation donnée à une équipe britannique de réaliser des chimères homme/animal et le vote au Parlement de la loi sur l’immigration autorisant le recours aux tests ADN dans le cadre du regroupement familial. Dans les deux cas, rappelle t-il en citant Jean Bernard, "c’est de l’homme qu’il s’agit" : de l’idée que l’on se fait de la dignité de l’espèce humaine.
En ce qui concerne les chimères, il rappelle que la technique conduit à un possible clonage, technique interdite en France. Pour certains le clonage n’a qu’une visée "thérapeutique" bien qu’il puisse aboutir à l’obtention d’un embryon. Cette intention thérapeutique est "fallacieuse" estime Alain Privat, car d’une part aucun résultat n’a été obtenu avec cette thérapie cellulaire et d’autre part on s’expose à la véritable réalisation de clone. Les partisans du clonage se félicitent de l’autorisation britannique car les chimères ne pourraient pas donner naissance à ces clones et constituent à leurs yeux des outils de recherche qualifiés "d’inédits et fascinants". Or, selon Alain Privat, cette vision doit être combattue car ce qui n’est pas possible aujourd’hui peut le devenir demain surtout en matière de clonage.
Pour les tests ADN, il estime que cette loi est dangereuse, car "elle conduit la médecine au service de la politique, et ainsi à faire fi de l’éthique". Ces tests pourraient être considérés comme un précédent qui légitimerait d’autres utilisations, notamment sur le plan thérapeutique. Par ailleurs, il estime qu’utiliser ces tests conduit à "réduire le principe de filiation à sa seule dimension biologique, et ainsi à dénier à l’homme toute dimension morale".
Dans les deux cas,"on ne peut être attentif qu’à une chosification de l’espèce humaine qui sous couvert de fournir à la médecine de nouveaux outils thérapeutiques, abolit la frontière entre l’homme et l’animal". Il conclut en rappelant aux médecins et aux chercheurs qu’ils ne peuvent se passer de la dimension éthique et "qu’ils doivent se garder de toute instrumentalisation par le politique".
La Croix 24/10/07