Arrêt du 1er essai clinique avec CSEh : ce qu’on peut comprendre

Publié le 31 Oct, 2011

La compagnie californienne de biotechnologie Geron a annoncé le 14 novembre qu’elle mettait fin à son essai clinique, sur l’homme, d’un traitement utilisant une lignée de cellules souches embryonnaires humaines (lignée GRNOPC1).

 

Initié en octobre 2010, cet essai était destiné à des patients paralysés à la suite de lésions totales de la moelle épinière. Le 20 octobre dernier, elle annonçait que 4 patients avaient déjà été traités et qu’ils ne présentaient aucune complication.
 

Un coût trop important

 

L’interruption de cet essai, un an après son lancement ultra médiatisé, marque l’abandon, par Geron, de l’ensemble de ses recherches sur les cellules souches embryonnaires humaines (CSEh). La société avait pourtant axé toute sa publicité sur ce secteur, déployant de nombreux efforts pour obtenir le droit de démarrer cet essai. Dans son communiqué, elle justifie l’arrêt de l’essai par son coût trop élevé. Une déclaration étonnante car la compagnie a reçu un soutien de 25 millions de dollars offerts par le Californian Institute for Regenerative Medicine (CIRM) le 5 mai 2011. Malgré cet appui, la compagnie n’a rien gagné à travailler sur les CSEh et ses pertes l’ont conduite à se séparer de 38% de ses employés.

 

Cherchant à revendre ses activités sur les cellules souches, elle veut désormais consacrer ses ressources à la phase 2 de ses essais cliniques sur deux produits anticancéreux. The Street, site d’actualité financière, dépeint la situation de Geron de façon caustique : “l’infâme réputation de Geron comme leveur de fonds en série, dont la seule réussite est d’avoir laissé les investisseurs payer les pots cassés, pourrait définitivement ternir l’ensemble du champ de recherche sur les cellules souches embryonnaires aux yeux de Wall Street“.
 

Absence d’efficacité

 

L’argument financier ne suffit pas à expliquer la décision de Geron : si les essais de phase I visent à tester la tolérance du traitement et non ses effets, la compagnie devait toutefois attendre un minimum de résultats. Ceux-ci ont manqué, ce qui explique la chute de la valeur en bourse de Geron. En France, le Dr Marc Peschanski, directeur du laboratoire I-Stem, a déploré l’arrêt de cet essai donnant selon lui “un mauvais signal aux investisseurs et aux pouvoirs publics sur l’état des travaux sur les cellules souches […] [dont le] potentiel est encore très important“.

 

Pour le Pr. Alain Privat, de l’Institut de neurosciences de Montpellier, les difficultés financières ne sont qu’un prétexte: “Geron aurait facilement trouvé des financements supplémentaires si son traitement avait montré qu’il était capable d’apporter des améliorations à l’état des patients atteints à la moelle épinière. Je pense plutôt que le traitement a été arrêté, soit par manque d’efficacité, soit pour des problèmes de rejets ou de sûreté pour les patients“.
 

Recherche sur les cellules souches embryonnaires : désillusion ?

 

L’interruption de l’essai de Geron porte un coup à la recherche sur les CSEh : il semble désormais que celle-ci ne conduira pas à des traitements miracles comme l’ont fait miroiter certains de ses promoteurs. A défaut de résultats, la confiance dans les CSEh pour développer des thérapies s’érode.

 

Au vu des bons résultats de récentes recherches sur les cellules souches adultes, le magazine New Scientist annonce un revirement : les cellules souches adultes “ouvrent- elles la voie sur le plan clinique? Absolument. Il y a par exemple près de 200 essais en cours dans le monde utilisant des cellules souches mésenchymateuses […]. En termes de nombre et de potentiel commercial, ils sont loin devant“.

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