L’assistance médicale à la procréation avec donneur est actuellement régie par le principe d’anonymat, qui stipule que "le donneur ne peut connaître l’identité du receveur, ni le receveur celle du donneur". L’irruption et l’attention portée récemment à ceux qui sont nés à la suite d’un don de gamètes pourrait entraîner les législateurs à revenir sur ce principe.
Le Conseil d’Etat a reconnu "que l’application radicale du principe d’anonymat comporte à long terme des effets préjudiciables, essentiellement parce que l’enfant est privé d’une dimension de son histoire, que son identité est fondée sur l’effacement de l’intervention d’un tiers". C’est d’ailleurs la raison invoquée par les enfants qui prennent aujourd’hui la parole, et qui ne recherchent pas un père, mais la connaissance de leurs origines.
La tendance internationale est à la levée de l’anonymat : Grande-Bretagne, Suède, Norvège, Autriche, Suisse, Finlande, Pays-Bas, Nouvelle-Zélande autorisent les enfants nés d’une insémination artificielle avec donneur à connaître l’identité de leur père biologique.
Pour les directeurs de CECOS (Centres d’études et de conservation du sperme), le principe d’anonymat reste pourtant une bonne chose : "La confidentialité permet à l’homme de trouver une place symbolique pour son projet de paternité", a expliqué à l’Assemblée Dominique Regnault, psychologue en CECOS. La psychanalyste Geneviève Delaisi de Parsival dénonce pour sa part une "loi qui est devenue complice d’une tentative d’annuler la portée symbolique de l’acte procréatif". Pour la philosophe Sylviane Agacinski, il s’agit d’une "conspiration du silence, une transaction secrète, indirecte et non marchande mais qui ressemble à un "marché" occulte".
Libération (Charlotte Rotman) 23/06/09